Hommage à Jacques Valette (2021)

vendredi 29 octobre 2021.
 

Jacques Valette (1929-2021)

Notre collègue Jacques Valette, né le 7 juin 1929 à Alger, est décédé à Paris le 12 avril 2021, à l’âge de 91 ans. Algérois, il fut notamment élève de Charles-Robert Ageron au lycée Emile-Félix Gautier, puis à la Faculté des lettres de l’Université d’Alger où il suivit également les cours de Xavier Yacono et de Marcel Emerit. De 1954 à 1957, il effectua son service militaire en Algérie, qu’il accepta comme un devoir. Puis il enseigna l’histoire au lycée du Champ de Manœuvres (Alger) de 1957 à 1962. Rapatrié en métropole, il obtint l’agrégation d’histoire en 1964. Il soutint deux thèses d’histoire coloniale, la première sur les relations franco-vietnamiennes de 1865 à 1875 (avant 1970) et la seconde sur « Socialisme utopique et idée coloniale, Jules Duval (1813-1870) », réalisée sous la direction de Xavier Yacono et soutenue à la Sorbonne en 1975.

Enseignant à l’Université de Poitiers durant plus de 25 ans, à partir de 1969, il dirigea 24 thèses soutenues de 1986 à 1996, et publia également de très nombreux comptes rendus et articles, principalement dans la Revue française d’histoire d’Outre-mer, devenue ensuite Outre-mers, revue d’histoire (39 publications de 1970 à 1984) ; puis, à partir des années 1980, il rejoignit l’équipe de la Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale et des conflits contemporains, devenue en 1987 Guerres mondiales et conflits contemporains, où il présida la commission Indochine. Durant sa carrière universitaire, il publia une collection de manuels sur des questions de préparation aux concours (aux éditions SEDES), en collaboration avec des spécialistes de chaque question ou bien seul ; parmi ces derniers La France et l’Afrique : L’Afrique française du Nord, 1914-1962 (1993), La France et l’Afrique : L’Afrique subsaharienne de 1914 à 1960 (1995), et Indochine 1940-1945, Français contre Japonais (1995).

A partir de sa retraite, il se consacra à la rédaction de comptes rendus, d’articles et de livres centrés sur l’histoire de la guerre d’Indochine (La guerre d’Indochine, 1945-1955, Paris, Armand Colin, 1994), de la guerre d’Algérie (La guerre d’Algérie des messalistes, L’Harmattan, 2003), et sur la carrière d’un officier colonial typique de sa génération, le général Salan, qu’il étudia minutieusement à partir de ses archives privées : Le général Salan et le retour des Français au Tonkin, Esprit du livre, 2009 ; Salan contre le Vietminh, Pays Thaï et Laos, 1952-1953, Esprit du livre, 2011 ; La guerre d’Algérie du général Salan (décembre 1956-décembre 1958), Esprit du livre 2008 ; Le 13 mai du général Salan, Esprit du livre, 2008 ; Salan, délégué général en Algérie, Esprit du livre 2010. Seule la période finale de sa carrière, celle de l’OAS, est restée en dehors de cette étude approfondie. En 2019, il préfaça la bande dessinée de Bernard Zeller et Pierre Tillocher, Raoul Salan, officier de la coloniale (Editions Via Romana). Il avait adhéré à l’association des amis de Raoul Salan, ce qui ne l’empêcha pas de poursuivre (de 2000 à 2009) la longue gestation d’un projet de colloque transformé en un ouvrage fondé sur les archives laissées par le général Gambiez  : Les guerres du général Gambiez, textes réunis par les professeurs Nicole Pietri et Jacques Valette (L’esprit du livre, 2009). Il était membre de l’Académie des sciences d’Outre-mer depuis le 15 décembre 1978, et de l’Association des écrivains combattants.

Je l’avais connu dans le cadre du Groupe d’études et de recherches maghrébines (GERM) qui rassemblait les historiens spécialistes de l’Afrique du Nord à Paris entre 1975 et 1983 autour de Charles-Robert Ageron. Celui-ci le fit participer au jury de mon habilitation à diriger des recherches en janvier 1993. En juillet 1999, il m’apporta son soutien dans la polémique qui m’opposa à Mohammed Harbi et Gilbert Meynier à propos de mon article sur les harkis publié dans le n°231 de L’Histoire (voir les textes abrégés de leur lettre et de ma réponse dans le n° 235, p 3). Et je n’ai pas oublié la joie que lui procura le succès initial de mon livre Pour une histoire de la guerre d’Algérie (Picard, 2002). Jusqu’au terme de ses activités, il resta fidèle à la conception d’une histoire fondée sur les archives.

Guy Pervillé

PS : La Société française d’histoire des Outre-mers avait déjà publié ma notice sur Jacques Valette, accompagnée d’une bibliographie sélective de ses principaux comptes rendus de lecture, articles et livres, sur son site à la date du 28 juin 2021 (voir : https://www.sfhom.com/spip.php ?article3815 ).


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