Nouveaux comptes rendus parus au 2ème semestre 2017 dans Outre-mers, revue d’histoire (2017)

mardi 9 janvier 2018.
 

La France en guerre d’Algérie, 1954-1962. Expériences métropolitaines de la guerre d’indépendance algérienne . Dirigé par Raphaëlle Branche et Sylvie Thénault.

Chapitres rédigés par Marie-Claude Albert, Nordine Amara, Linda Amiri, Gilbert Beaubatie, Dalila Berbagui, Emmanuel Blanchard, Gérard Boëldieu, Gérard Bourdin, Clément Bouvier, Hélène Bracco, Hélène Chaubin, Danielle Chevallier, Laurent Chevrel, Mireille Conia, Marc Coppin, Gilles Deroche, Michel Dloussky, Emilie Elongbil Ewane, Gil Emprin, Rémy Foucault, Sven de Geyer, Jean-Luc Gillard, Arthur Grosjean, Bertrand Hamelin, Caroline Izambert, Didier Lavrut, Catherine Le Guen, Jean-Philippe Marcy, Annie Martin, Alain Monchablon, Anne Pasques, Anne-Marie Pathé, Yann Scioldo-Zurcher et Alain Trogneux.

Paris, Autrement, 2008, 506 p, 26 euros.

Ce livre, dédié à la mémoire de Pierre Vidal-Naquet (1930-2006), a été publié il y a plus de neuf ans déjà, et il n’est pas convenable d’avoir attendu si longtemps pour le lire entièrement, même si le grand nombre des auteurs (36) et des sujets traités (43) ainsi que leur grande diversité, peuvent expliquer cet injustifiable retard. Il s’agit d’une recherche collective, dirigée par Raphaëlle Branche et Sylvie Thénault en s’appuyant sur le réseau des correspondants départementaux de l’Institut d’histoire du temps présent (IHTP), qui associe de nombreux enseignants-chercheurs. L’enquête n’est pourtant pas exhaustive, car elle ne recouvre pas tous les départements, mais elle constitue « une approche pionnière des sources locales », et « une première exploration de grande ampleur des ressources disponibles en France » comme l’explique dans sa communication Anne-Marie Pathé, ingénieur d’études à l’IHTP. Les 41 articles consacrés à des sujets particuliers sont regroupés en cinq parties clairement distinctes.

Comme l’expliquent les deux directrices du projet dans leur introduction (p. 16), « les trois premières parties de ce livre donnent à voir les expériences des habitants de la métropole. Apparaît ainsi une gradation allant de la majorité, pour qui l’Algérie pouvait n’être qu’une réalité lointaine, aux minorités engagées, conscientes des événements, de leurs enjeux, et souhaitant peser sur leur évolution, en passant par des milieux qui, sans forcément se prononcer sur le sort de l’Algérie, furent sensibles à l’événement qui les touchait et réagirent » (...). « Les deux autres parties du livre se placent du point de vue des politiques publiques déployées envers ceux que leur lien avec l’Algérie - ou leur engagement - transformait en enjeu - ou en cible - dans le contexte de la guerre : migrants algériens, rapatriés, membres des partis nationalistes ou de l’OAS ». La première partie (pp. 30-135) évoque « un écho lointain de l’Algérie dans une France encore très rurale ». La deuxième (pp. 136-219) présente « enseignants, étudiants, syndicalistes chrétiens ... des milieux très réceptifs ». Le troisième (pp. 220-315) examine plusieurs manières différentes de « s’engager sur le sort de l’Algérie », à gauche mais aussi à droite. La quatrième (pp. 316-405) analyse diverses manières de « réprimer » les activités du FLN ou du MNA (détention dans des « centres de transit », traduction en justice devant les tribunaux militaires, internement sans jugement dans des camps), sans oublier la réutilisation tardive des mêmes lieux pour interner des partisans de l’Algérie française. Enfin, la cinquième partie (pp. 406-462) présente « logement et insertion sociale : des enjeux de la guerre », en examinant les cas des travailleurs algériens, ceux des « rapatriés » et ceux des « harkis ».

Toutes ces contributions se distinguent par un ton d’une objectivité irréprochable. Il s’y ajoute des annexes particulièrement utiles : une chronologie très pertinente [1], établie avec l’aide de Linda Amiri, Emmanuel Blanchard et Yann Scioldo-Zurcher, des orientations bibliographiques très utiles (pp. 474-479), une liste des sigles (pp. 480 à 485), un index des acteurs cités (p. 486-492) et des noms de lieux (pp. 491-495), les biographies des contributeurs (pp. 496-501) et des remerciements à ceux qui les ont aidés, et enfin une table des matières (pp. 503-506). En somme, une vraie publication scientifique, qui prend honorablement la suite des deux grands ouvrages collectifs publiés antérieurement sur la guerre d’Algérie par l’IHTP : La guerre d’Algérie et les Français (1988) publié en 1990 chez Fayard par Jean-Pierre Rioux, et La guerre d’Algérie et les Algériens (1996), publié en 1997 chez Armand Colin par Charles-Robert Ageron.

Histoire de l’Algérie à la période coloniale, 1830-1962 . Sous la direction de Abderrahmane Bouchène, Jean-Pierre Peyroulou, Ouanassa Siari Tengour, Sylvie Thénault. Postface de Gilbert Meynier et Tahar Khalfoune.

Chapitres rédigés par Raberh Achi, Zineb Ali-Benali, Linda Amiri, Omar Bessaoud, Hélène Blais, Emmanuel Blanchard, Laure Blévis, Anissa Bouayed, Abderrahmane Bouchène, Raphaëlle Branche, André Brochier, Benjamin Claude Brower, Jeffrey James Byrne, Jacques Cantier, Omar Carlier, Marie Chominot, Muriel Cohen, Fanny Colonna (1934-2014), Marc Côte, Vincent Courcelle-Labrousse, Jocelyne Dakhlia, Olivier Dard, Florence Deprest, Samya El-Mechat, Giulia Fabbiano, Claire Fredj, Julien Fromage, René Gallissot, Gilbert Grandguillaume, Isabelle Grangaud, Fatima Zohra Guechi, Didier Guignard, Sofiane Hadjadj, François-Xavier Hautreux, Jean-Robert Henry, Choukri Hmed, Jim House, Nicolas Hubert, Jan C. Jansen, Vincent Joly, Mahfoud Kaddache (1921-2006), Kamel Kateb, Céline Keller, Tahar Khalfoune, Annick Lacroix, Ghanem Laribi, Denis Leroux, Michel Levallois, Neil Mac Master, Hocine Malti, Nadir Marouf, Claire Marynower, James Mac Dougall, Lemnouar Merouche, Alain Messaoudi, Gilbert Meynier, Amar Mohand-Amer, Christine Mussard, André Nouschi (1922-2017), Jean-Pierre Peyroulou, Christian Phéline, François Pouillon, Tramor Quemeneur, Malika Rahal, Belkacem Recham, Florence Renucci, Daniel Rivet, Clifford Rosenberg, Mohammed Brahim Salhi, Ryme Serdjeli, Jennifer Sessions, Emmanuelle Sibeud, Benjamin Stora, Christelle Taraud, Yassin Temlali, Ouanassa Siari Tengour, Sylvie Thénault, George R. Trumbull IV, Hugo Vermeren, Danièle Voldman, Tassadit Yacine, Lahcène Zeghdar, Yann Scioldo-Zurcher.

Paris, La Découverte, et Alger, Barzakh, 2012, 717 p, 28,50 euros.

Mon retard à rendre compte de cet autre ouvrage collectif n’est pas plus excusable, même s’il est moindre. Il s’agit en effet d’une entreprise encore plus ambitieuse, qui a regroupé 100 articles dus à 83 auteurs français, algériens, ou d’autres nationalités, en un seul volume. Elle est une nouvelle illustration de la conception de l’histoire de l’Algérie que Gilbert Meynier avait une première fois expérimentée en juin 2006, en organisant à l’Ecole Normale supérieure de Lyon, avec Frédéric Abécassis, un grand colloque réunissant un grand nombre d’historiens français, algériens et étrangers, intitulé « Pour une histoire critique et citoyenne, au-delà des pressions officielles et des lobbies de mémoire, le cas de l’histoire algéro-française ». La co-direction de l’ouvrage par deux directeurs algériens et par deux français est donc très significative, de même que la postface rédigée en commun par Gilbert Meynier et par un collègue algérien.

L’introduction, intitulée « Pour une histoire partagée et critique de l’Algérie à la période coloniale », se situe explicitement dans la même perspective. Elle définit précisément la conception de l’ouvrage, qui n’est pas un simple dictionnaire historique, mais qui veut combiner les approches chronologique et thématique. En effet, le plan d’ensemble divise la matière en quatre parties chronologiques, intitulées : - « 1830-1880 : la prise de possession du pays » ; - « 1881-1918 : deux Algéries » ; « 1919-1944 : à l’heure des initiatives algériennes » ; - « 1945-1962 : vers l’indépendance... » . Chacune commence par une présentation générale détaillée de la période, suivie par une chronologie, puis par au moins une vingtaine d’articles spécialisés, qui se répartissent entre quatre ou cinq parties, les deux premières visant à « dégager les logiques en présence de part et d’autre du rapport de domination coloniale : celles des autorités politiques françaises et des colons, parfois en opposition, même si leurs intérêts ultimes restent communs ; et logiques de la société coloniale, celle des ‘indigènes’ » (p. 15). Les suivantes sont intitulées « lieux et espaces », « acteurs », et « contexte ». Donc un plan très rigoureusement conçu et organisé. Etant donné le très grand nombre des articles, il me semble préférable de limiter mon analyse aux synthèses qui annoncent chaque partie, en priant les nombreux auteurs d’excuser ce choix. Ces quatre synthèses présentent l’essentiel des faits d’une manière généralement très satisfaisante.

La première partie (pp. 17-155) est présentée par Jean-Pierre Peyroulou, Ouanassa Siari Tengour et Sylvie Thénault sous un titre plus explicite : « 1830-1880 : la conquête coloniale et la résistance des Algériens ». Cette présentation générale, la chronologie et tous les articles qui suivent n’appellent aucune objection de la part du lecteur, et lui donnent l’impression d’un pari gagné. La deuxième (pp. 157-315) est introduite par Sylvie Thénault sous le titre : « 1881-1918 : l’ ‘apogée’ de l’Algérie française et les débuts de l’Algérie algérienne ». Elle obtient sans aucune peine l’adhésion du lecteur, même si celui-ci pourrait discuter l’emploi du mot « Algériens » pour désigner les indigènes musulmans et non pas les Européens d’Algérie alors qu’à cette époque, il était employé le plus souvent pour désigner ces derniers.

La troisième partie (pp. 316- 462) est présentée par Jean-Pierre Peyroulou sous le titre « 1919-1944 : L’essor de l’Algérie algérienne », qui semble conditionner son contenu. En effet, même si la démonstration est globalement convaincante, ce contenu est affaibli par une sous-estimation patente de l’émergence tardive d’une politique algérienne de la France à la fin de la Deuxième guerre mondiale. Cette perspective tronquée apparaît dès les premières pages de cette présentation, quand l’auteur critique le thème des « occasions perdues » par la politique de la France en Algérie en soulignant « deux données fondamentales » : le fait que « de plus en plus d’Algériens ne désiraient pas être français mais algériens », et que « si l’Algérie était la seule véritable colonie de peuplement de l’Empire français et si la société européenne d’Algérie était partagée par tous les clivages sociaux et politiques de classes, elle était établie sur une économie très inégalitaire reposant sur un capitalisme colonial privilégiant les exportations agricoles vers la métropole, protégé par l’Etat et employant une main d’œuvre algérienne bon marché ». Pourtant, les dernières pages de cette présentation et la fin de la chronologie de la période mentionnent bien le discours du général de Gaulle à Constantine le 12 décembre 1943 et la création d’une commission des réformes musulmanes (qui siégea de décembre 1943 à juillet et non pas janvier 1944) ; or celle-ci n’inspira pas seulement l’ordonnance du 7 mars 1944 accordant des droits politiques à certains catégories de « Français musulmans », voire à tous, mais aussi un plan de réformes économiques et sociales destinées à en faire vraiment les égaux des Français d’Algérie et de France. Cette lacune étonnante affaiblit la démonstration de Jean Pierre Peyroulou [2].

La quatrième et dernière partie, intitulée « 1945-1962 : vers l’indépendance », est présentée par l’historienne algérienne Ouanassa Siari Tengour en moins de 30 pages (pp. 465-493) qui sont dans l’ensemble très satisfaisantes et tendent à l’impartialité, tout en voulant faire comprendre aux Français les raisons de la révolte algérienne. Je dois néanmoins signaler deux points qui appellent des critiques.

Le premier est la difficulté qu’a - parfois - l’auteure à traiter impartialement certains épisodes très controversés. Le cas le plus net est celui de la révolte et de la répression du 8 mai 1945. Dans la page 466, elle écrit successivement deux phrases qui semblent contradictoires : d’abord, « la répression des manifestations (...) du 8 mai, jour de l’armistice et donc du retour à la paix, a provoqué de violentes émeutes (102 colons furent tués) qui ont donné lieu en représailles, en mai et juin, à des massacres coloniaux marqués par des violences inouïes de la part des forces de l’ordre secondées par les milices de colons », ce qui est exact. Mais elle continue ainsi : « La seule présence des foules algériennes dans les rues des différentes villes suffit pour déclencher une répression qui mobilisa des moyens disproportionnés », ce qui est inexact puisque la répression ne se déchaîna qu’autour de Sétif et de Guelma et non pas dans toutes les villes où des manifestations avaient eu lieu. Puis à la page 475, elle évoque de nouveau « les émeutes meurtrières provoquées par la brutale répression des manifestations nationalistes de mai 1945 dans le Nord-Constantinois », ce qui est encore plus faux puisque la répression a répondu à ces « émeutes meurtrières » et à l’insurrection qui s’était répandue autour de Sétif et de Guelma. Sur cette question, elle renvoie à une bibliographie incomplète. Ces contradictions rendent perceptibles la différence qui sépare l’histoire et la mémoire.

Sur le même sujet, Jean-Pierre Peyroulou, auteur d’une thèse remarquable sur la répression de Guelma, développe par la suite une analyse beaucoup plus détaillée et nuancée dans son article sur « Les massacres du Nord-Constantinois de 1945, un événement polymorphe » (pp. 502-507), mais lui aussi part d’une bibliographie incomplète puisqu’il ignore l’ouvrage fondamental de Roger Vétillard, Sétif, Guelma mai 1945, massacres en Algérie, publié en 2008 et réédité en 2011. Au contraire les phrases beaucoup trop brèves qu’Ouanassa Siari Tengour consacre à la page 481 à la sanglante insurrection du 20 août 1955 dans le Nord Constantinois auraient dû être complétées en renvoyant à un autre ouvrage de Roger Vétillard, 20 août 1955 dans le Nord-Constantinois, un tournant dans la guerre d’Algérie ?, paru en février 2012, et au témoignage remarquable de Roger Le Doussal, Commissaire de police en Algérie, paru en 2011. La regrettable absence d’une bibliographie générale complète à la fin de l’ouvrage se fait ici sentir [3].

D’autre part, Ouanassa Siari Tengour paraît ignorer, comme Jean-Pierre Peyroulou, l’existence du programme de réformes non seulement politiques, mais aussi économiques et sociales élaboré par la commission des réformes musulmanes de janvier à juillet 1944, puisqu’elle ne le mentionne pas dans son analyse de « l’échec des plans de développement » qu’elle présente dans les pages 471-472 en s’appuyant sur la thèse de Hartmut Elsenhans, Frankreichs Algerienkrieg, 1954-1962, publiée en allemand à Munich en 1974 et traduite en français en 2000. Elle ne signale donc pas la continuité entre la « politique d’assimilation et d’intégration » prônée par le général Catroux en 1944, la politique d’intégration que Jacques Soustelle voulut relancer en 1955 et le plan de Constantine d’octobre 1958. Or cette commission des réformes de 1944 est l’une des très rares lacunes de la thèse magistrale de Hartmut Elsenhans, mais elle tient une grande place dans une autre thèse allemande, celle de Thankmar Von Münchhausen, Kolonialismus und Demokratie, Die französische Algerien politik von 1945-1962, publiée à Munich en 1977. En français, elle a été signalée dans le recueil de textes sur Le mouvement national algérien de Claude Collot et Jean-Robert Henry publié en 1978 (p. 171), résumée par Mahfoud Kaddache dans sa thèse sur l’Histoire du nationalisme algérien (1919-1951) publiée à Alger en 1980 (t. 2, pp. 652-655), et présentée plus en détail par Charles-Robert Ageron dans le t. 2 de la grande Histoire de l’Algérie contemporaine, paru en 1979, mais en traitant séparément les réformes politiques (pp. 563-567) et les réformes économiques et sociales (pp. 496-506). Daniel Lefeuvre avait consacré sa thèse, publiée en 1997, à la politique d’industrialisation de l’Algérie de 1930 à 1962, notamment celle de Vichy et celle du CFLN. Pour ma part, j’ai souligné l’unité de la politique de réformes du CFLN dans ma communication au colloque sur Les chemins de la décolonisation de l’empire colonial français organisé par l’IHTP en 1984 et publié en 1986, en présentant « La commission des réformes de 1944 et la définition d’une nouvelle politique algérienne de la France », mais j’ai attendu 2012 pour analyser ses travaux en détail dans mon livre La France en Algérie, 1830-1954. L’œuvre de cette commission des réformes musulmanes n’en est pas moins supposée connue depuis longtemps.

Le plus étonnant est que Ouanassa Siari Tengour finit par citer elle aussi, entre guillemets, la commission « chargée d’établir un programme de réformes politiques, sociales et économiques en faveur des musulmans d’Algérie » (p. 478), mais sans explication ni commentaire. Il aurait pourtant été utile de montrer que la révolte du parti nationaliste algérien puis du FLN s’était heurtée, non seulement à l’obstruction aveugle d’un colonialisme borné, mais aussi à l’idée nouvelle de l’administration française éclairée que la revendication d’indépendance ignorait dangereusement les données économiques et démographiques du problème algérien, jusqu’à ce que la découverte des richesses pétrolières et gazières du Sahara vienne changer ces données en rendant l’indépendance enfin possible. En somme, au « politique d’abord » des nationalistes algériens s’est opposé un « économique d’abord » des experts français.

Cette lacune gênante donne l’impression que le vrai sujet du livre serait plus l’émergence du nationalisme algérien que la politique algérienne de la France. Mais il n’en reste pas moins vrai que cet ouvrage collectif, qui rassemble beaucoup plus d’informations diverses que celles exposées dans les quatre chapitres de synthèse, constitue un ensemble très riche, et qui mérite d’être étudié de près. Le pari de rassembler tant de chercheurs pour démontrer la possibilité de proposer une histoire franco-algérienne émancipée des pressions mémorielles a été pour l’essentiel tenu. Remarquons pourtant que, suivant la postface de Tahar Khalfoune et Gilbert Meynier (p. 683), l’article 62 de la Constitution algérienne amendée en 2008 attribue à l’Etat le rôle d’ « œuvrer à la promotion de l’écriture de l’histoire et de son enseignement aux jeunes générations », afin de lui assurer la soumission des historiens. Ce qui limite la portée de cet ouvrage transnational, en avance sur son temps.

Guy Pervillé

NB : Ce compte rendu avait été rédigé avant le décès de Gilbert Meynier (13 décembre 2017).

[1] Même si à la page 463, la mention du 8 mai 1945 oublie l’insurrection qui a provoqué la répression, et cite un bilan de celle-ci « estimé entre 15.000 et 20.000 morts » qui n’est pas établi.

[2] Des programmes d’industrialisation proposés depuis 1937 dans la perspective d’une guerre sont mentionnés dans l’article de René Gallissot, « L’économie coloniale dans l’entre-deux-guerres » (pp. 369-375), mais il ne cite pas le plan de réformes de 1944 ni ses dimensions autres qu’industrielles. Celui de Jacques Cantier, « Vichy et l’Algérie, 1940-1942 » (pp. 381-386), montre pourtant la diversité des volets de la politique musulmane lancée par le directeur Augustin Berque sous l’autorité du général Weygand, et continuée ensuite sous celle du CFLN.

[3] On peut s’étonner aussi de l’absence des livres de Jean-Paul Brunet et de Rémy Valat dans les bibliographies des articles qui concernent le 17 octobre 1961.



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