La relation franco-algérienne a une longue histoire qu’il faut garder en tête sans que nous puissions la retracer ici en détail : une relation complexe entre deux pays autrefois rassemblés dans l’empire romain, puis séparés par la conquête arabo-islamique ; relation institutionnalisée au XVIème siècle par une alliance franco-turque paradoxale, mais déséquilibrée depuis 1830 par la conquête et la colonisation françaises, puis de nouveau très gravement perturbée par les révoltes et les répressions, d’abord en mai 1945, puis de 1954 à 1962. Cependant, l’indépendance de l’Algérie acceptée par la France en 1962 semblait permettre un apaisement, qui avait été concrétisé jusqu’en 1990 par une convergence des recherches historiques dans les deux pays, notamment au sujet de l’insurrection du 8 mai 1945 et de sa répression. Or le progrès de l’histoire a été de plus en plus perturbé, en Algérie et en France, par la résurgence de la mémoire du passé et par son utilisation dans des luttes politiques internes, à partir de la transformation soudaine de la vie politique algérienne par la libéralisation du régime politique algérien en 1989 et par la contestation croissante des islamistes durant les années 1990.
De 1990 à nos jours : retour de mémoire et instrumentalisation de l’histoire algérienne ?
La mémoire du 8 mai 1945 a été longtemps occultée en France alors qu’elle était exaltée par les nationalistes algériens. Voici un bref rappel des faits incontestés. Le 8 mai, des défilés officiels sont organisés en Algérie pour fêter la capitulation allemande et la fin de la guerre. D’autres manifestations organisées par les nationalistes algériens ont été autorisées sous condition de n’arborer aucun emblême ou slogan jugé séditieux par les autorités, qui viennent d’exiler le leader Messali Hadj à Brazzaville pour éviter un soulèvement. Mais à Sétif, à Bône et à Guelma, des drapeaux et des banderoles nationalistes sont arborées, ce qui provoque l’intervention armée de la police voulant les arracher. Un début s’insurrection se produit à Sétif et se répand dans les campagnes environnantes, puis dans les environs de Guelma. La répression reprend rapidement le dessus, mais elle sévit pendant plusieurs semaines, particulièrement à Guelma et dans ses environs. Le bilan est bien connu du côté français : 102 morts (dont 14 militaires, et 2 prisonniers italiens), 110 blessés et 10 femmes violées. Mais il est resté très incertain du côté des insurgés : officiellement 1.165 morts, mais ce bilan n’a convaincu personne, et d’autres estimations officieuses ont rapidement circulé : 5.000 à 6.000, 6.000 à 8.000, voire 15.000 à 20.000. Les nationalistes ont retenu 45.000 morts, voire davantage (80.000 ou 100.000 ?), mais sans démonstration probante. Quant aux causes de ces événements, elles ont été longtemps controversées, entre l’interprétation de la gauche, notamment communiste, dénonçant un complot colonialiste des grands colons et de la haute administration manipulant des nationalistes pro-hitlériens, et l’interprétation de la droite colonialiste dénonçant uniquement un complot nationaliste algérien [2].
D’abord exalté par la propagande nationaliste algérienne et passé sous silence par la propagande française jusqu’en 1962, ce sanglant épisode a commencé à prendre sa place dans l’histoire de l’Algérie grâce aux travaux des historiens algériens et français entre 1962 et 1990. On pouvait donc espérer la constitution progressive d’un savoir historique commun. Or, ce processus logique a été de plus en plus contrarié par un autre processus à motivation essentiellement politique, et qui a dévié de l’histoire vers la mémoire, à la suite de la recrudescence de troubles internes qui ont pris le caractère d’une guerre civile dans les années 1990, tout en prétendant répéter la guerre de libération nationale des années 1954 à 1962. Cependant, l’épisode précurseur de 1945 a été particulièrement mis en avant, sans doute parce qu’il n’avait jamais fait l’objet d’un arrangement légal franco-algérien tel que les accords d’Evian du 19 mars 1962, couvrant du voile de l’oubli les actes de violence commis par les deux camps depuis le 1er novembre 1954.
C’est en 1990 que fut créée la Fondation du 8 mai 1945 par l’ancien ministre Bachir Boumaza, natif de Kerrata au nord de Sétif. Suivant l’un de ses premiers manifestes, celle-ci était « née dans un contexte politique dangereux. Celui de la révision insidieuse par certains nationaux, y compris dans les cercles du pouvoir, de l’histoire coloniale. Procédant par touches successives, certains hommes politiques ont, sous prétexte de ‘dépasser’ une page noire de l’histoire coloniale, encouragé la ‘normalisation’ des rapports entre l’ancienne puissance dominatrice et son ancienne colonie ». C’est pourquoi la Fondation s’est donnée pour objectifs de « réagir contre l’oubli et réanimer la mémoire, démontrer que les massacres de Sétif sont un crime contre l’humanité et non un crime de guerre comme disent les Français », pour « obtenir un dédommagement moral » [3]. Ainsi, l’histoire a été mobilisée au service de la mémoire et de la politique au lieu d’être reconnue comme un but propre.
L’une des idées directrices de la Fondation est en effet d’interpeller la conscience des Français et des autres peuples européens qui « ne semblent s’indigner que sur l’holocauste commis contre les juifs. Cette ségrégation entre les massacres est une tare du monde occidental » [4]. Bachir Boumaza constate : « On applique et on reconnaît le crime contre l’humanité à propos des juifs, mais pas aux Algériens, dont on oublie qu’ils sont des sémites ». Il présente son action comme un effort pour « décoloniser l’histoire et situer la colonisation dans l’histoire de l’humanité », « une tentative saine et correcte d’écrire l’histoire. Le phénomène colonial est porteur de certaines valeurs qui doivent disparaître. Elles ne le sont pas encore. Et son expression la plus réussie est ce terme de crime contre l’humanité qui est réservé à une catégorie spéciale de la population ». A son avis, la colonisation française en Algérie « présente, dans toutes ses manifestations, les caractéristiques retenues au tribunal de Nuremberg comme un crime contre l’humanité » ; et il ajoute : « J’ai suivi le procès Barbie. Depuis 1830, l’Algérie a connu des multitudes de Barbie », lesquels n’ont pas été condamnés parce que leurs crimes contre des Algériens n’étaient pas considérés comme tels [5]. On voit que l’histoire est ici totalement subordonnée à des motivations politiques extérieures au sujet.
Cette revendication s’est largement diffusée en Algérie pendant les années de guerre civile. Sous l’impulsion de la Fondation, les autorités et la presse ont donné un très grand retentissement à chaque anniversaire du 8 mai 1945, et tout particulièrement à son cinquantenaire en 1995. Les discours officiels et les éditoriaux ont alors établi un lien explicite entre la commémoration d’un drame national et l’appel à rétablir l’unité nationale déchirée : « la célébration de ce douloureux anniversaire du massacre de plus de 45.000 Algériens et Algériennes constitue une nouvelle occasion pour interpeller notre conscience sur le sort réservé à ce grand pays qu’est le nôtre, aux prises avec une redoutable crise multidimensionnelle dont l’issue, impatiemment attendue par tous, risque de tarder encore si le bon sens et la sagesse qui nous sont coutumiers font défaut . C’est dans ce sens que M. Mokdad Sifi, chef du gouvernement, a inscrit son intervention remarquée lors de la commémoration de la date historique du 8 mai 1945 », écrit l’éditorialiste d’El Moudjahid [6]. Le quotidien indépendant El Watan a reproduit intégralement ce discours, situé mai 1945 dans une longue série de répressions répétées depuis 1830, invité les intellectuels algériens à « travailler au corps » les démocrates français pour qu’ils diffusent dans leur société un sentiment de responsabilité et de culpabilité [7], et réclamé à l’Etat français des excuses officielles au peuple algérien « pour les centaines de milliers d’innocents assassinés au cours de 130 ans de domination coloniale ». D’après Liberté, la commémoration du 8 mai est aujourd’hui revendiquée par toute la classe politique, et fait même l’objet d’une surenchère [8]. L’ensemble de ces discours et articles commémoratifs, répétés chaque année, paraît une tentative de rassembler les Algériens divisés contre la France, en ranimant la flamme du nationalisme pour ne pas l’abandonner aux islamistes. Et c’est pourquoi l’enjeu de mémoire du 8 mai 1945 s’est élargi à l’ensemble des relations franco-algériennes de 1830 à nos jours, pour imposer une revendication mémorielle unilatérale, radicalement différente de l’amnistie réciproque prônée par les accords d’Evian.
L’Algérie se trouvait en effet devant un choix difficile. Relancer une « guerre des mémoires » contre la France jusqu’à ce que celle-ci fasse amende honorable pouvait détourner momentanément l’attention des Algériens des défauts de leur système politique, sans garantir pour autant le ralliement de tous les islamistes. Mais céder aux aspirations « révisionnistes » d’un prétendu « Parti de la France » aurait risqué d’encourager la violence islamiste en semblant la légitimer. Le président Bouteflika a choisi la première voie, en suggérant un acte de repentance à la France dans son discours du 15 juin 2000 à l’Assemblée nationale française : « De vénérables institutions, comme l’Eglise, des Etats aussi anciens que le vôtre n’hésitent pas, aujourd’hui, à confesser les erreurs et les crimes qui ont, à un moment ou à un autre, terni leur passé. Que vous ressortiez des oubliettes du non-dit la guerre d’Algérie, en la désignant par son nom, ou que vos institutions éducatives s’efforcent de rectifier, dans les manuels scolaires, l’image parfois déformée de certains épisodes de la colonisation, représente un pas important dans l’œuvre de vérité que vous avez entreprise, pour le plus grand bien de la connaissance historique et de la cause de l’équité entre les hommes » [9]. Le président Jacques Chirac a longtemps fait semblant de ne pas avoir compris cette demande, mais la négociation d’un traité d’amitié entre la France et l’Algérie semble en avoir fait une condition impérative du côté algérien. Le 27 février 2005, le discours prononcé à Sétif par l’ambassadeur de France [10] a paru apporter une première concession française à la demande algérienne, moins d’une semaine après le vote d’une loi mémorielle favorable à la mémoire des Français et des Français musulmans d’Algérie [11].
Que s’est il passé durant ces cinq années ? Un processus de rapprochement franco-algérien tendant à la signature d’un traité d’amitié s’est mis en route, mais n’a pas encore abouti. Contrairement à ce qui était annoncé comme certain il y a un peu plus d’un an, l’année 2005 a été celle de la désillusion, et 2006 ne semble pas mieux partie.
L’annonce du futur traité d’amitié franco-algérien
L’histoire diplomatique des relations franco-algériennes et du futur traité n’est pas facile à faire, à cause de son caractère confidentiel, et beaucoup de journalistes ont remarqué qu’aujourd’hui encore le contenu de ce futur traité reste inconnu. On sait néanmoins que le rapprochement franco-algérien s’est d’abord traduit par la décision de faire de l’année 2003 l’année de l’Algérie en France pour rapprocher les deux peuples avant de rapprocher les deux Etats. Rapprochement contesté à la fois par certains Algériens au nom du devoir de ne pas faire oublier les victimes de la décennie précédente, et par certains Français au nom de la fidélité à l’Algérie française et aux « harkis » (qualifiés de « collabos » par le président Bouteflika lors de sa visite de l’an 2000). La visite officielle du président Chirac à Alger, du 2 au 4 mars 2003, fut néanmoins un triomphe reconnu par toute la presse des deux pays. C’est alors qu’une déclaration officielle annonça la rédaction d’un futur traité d’amitié franco-algérien ; mais l’absence de réponse du président français à la demande algérienne de repentance fut critiquée par de nombreux journaux algériens, désapprouvant la tendance populaire à renoncer à la dignité nationale pour réclamer des visas. Un peu plus d’un an après, la réélection du président Bouteflika, très vivement contestée par ses opposants, fut chaleureusement reconnue par le président français, qui vint aussitôt rendre visite à son homologue algérien pour le féliciter de sa victoire, le 15 avril 2004 [12].
C’est alors, semble-t-il, que les événements se sont accélérés. D’une part, le président Chirac a voulu hâter le rapprochement franco-algérien en utilisant habilement la commémoration du débarquement de Provence du 15 août 1944, et annoncer la signature d’un traité d’amitié franco-algérien inspiré du traité franco-allemand pour l’année suivante. D’autre part, il a voulu mettre fin à la guerre franco-française d’Algérie par une loi donnant satisfaction aux principales revendications morales et matérielles d’un ensemble d’associations de rapatriés et de « harkis », dont il s’était ménagé le soutien en désapprouvant la volonté de la gauche de faire du 19 mars la date d’une commémoration nationale de la guerre d’Algérie peu avant les élections présidentielles et législatives de 2002 [13]. Ainsi la politique de la France par rapport à l’Algérie comportait deux volets qu’il fallait combiner et concilier. Or la conciliation de ces deux volets n’allait pas sans difficulté.
Plus d’un mois avant la commémoration du débarquement du 15 août 1944, le 13 juillet 2004, une soixantaine d’élus de la majorité parlementaire avaient écrit au ministre des Affaires étrangères Michel Barnier pour se faire l’écho des remous que suscitaient dans de nombreuses associations d’anciens combattants, de rapatriés et de harkis la présence du président algérien Bouteflika, qui avait « toujours ignoré et bafoué » la mémoire légitime de ces dernières catégories. Sans demander l’annulation de son invitation, ils demandaient que celui-ci annonce « un certain nombre de mesures très attendues par les rapatriés d’Algérie et notamment harkis, parmi lesquelles la libre circulation des harkis, la coopération sur le sort des disparus et la reconnaissance de la violation des accords d’Evian ». Sinon, son invitation représenterait « une insulte à la mémoire de ceux qui sont tombés pour libérer la France ». L’initiateur de cette pétition, le député de Paris Claude Goasguen, protesta de nouveau le 6 août contre l’absence de réponse du ministre, alors que le ministre délégué aux Anciens combattants, Hamlaoui Mekachéra, demandait qu’aucune confusion ne soit faite « entre cette page d’histoire écrite en commun en août 1944 et d’autres événements ultérieurs, aussi douloureux soient-ils » [14]. Michel Barnier répondit alors, le 9 août, en jugeant légitime la venue du président algérien, étant donné l’importance des sacrifices consentis par les peuples du Maghreb, y compris les Algériens. Tout en se disant « conscient du souvenir douloureux » laissé par la guerre d’Algérie de 1954-1962, « en particulier chez les harkis », il estimait que cet épisode ne saurait « affecter la reconnaissance de la France à l’égard des soldats d’outre-mer ». Il expliquait également qu’un « travail de mémoire constructif » était mené en commun avec Alger et avait déjà obtenu des résultats concernant la libre circulation des harkis et la réhabilitation des cimetières français en Algérie. Le groupe de députés conduit par M. Goasguen exprima le 11 août sa satisfaction de voir s’engager « un dialogue nécessaire et constructif » avec Alger, tout en restant vigilant. Le même jour, Hamlaoui Mekachera déclara sur France-Inter : « Nous devons aider le gouvernement à parfaire ses relations diplomatiques plutôt que de les handicaper », et assura que le président algérien devait être reçu avec dignité [15].
Dans un éditorial daté du 10 août, le grand quotidien Le Monde prit nettement parti contre la « philippique » des 60 députés UMP lancée contre le président algérien sous prétexte de défendre la « mémoire » française du drame algérien et l’honneur des harkis « ressortis de l’oubli pour l’occasion », et il cita élogieusement la réaction du ministre d’Etat Hamlaoui Mekachera, pour qui « aucune confusion n’est à faire entre cette page d’histoire écrite en commun en août 1944 et d’autres événements ultérieurs, aussi douloureux soient-ils ». Il rappela « que la plupart de ces soldats de l’armée d’Afrique étaient nord-africains ou d’Afrique noire et qu’ils ont, par dizaines de milliers, donné leur vie pour une patrie qui n’était pas vraiment la leur. Car, une fois rentrés au pays, les tirailleurs algériens qui avaient connu l’égalité devant la mort sur les champs de bataille ont compris, notamment en mai 1945 à Sétif, qu’ils ne seraient pas des égaux dans la société coloniale française » [16].
Les titres des articles du journal illustrent parfaitement ce parti-pris. Sur la double page du 14 août, on peut lire la présentation suivante : « La France retrouve sa mémoire. Au cours des célébrations du 60 ème anniversaire du débarquement de Provence, dimanche 15 août, à Toulon (Var), JACQUES CHIRAC devrait rendre hommage aux anciens combattants africains et maghrébins qui ont débarqué sur les côtes varoises en août 1944. Quelques 300 VETERANS originaires des anciennes colonies françaises devraient être présents à Toulon, lors de cérémonies auxquelles seize chefs d’Etats africains ont été conviées. Malgré des PENSIONS MILITAIRES DERISOIRES, ces anciens frères d’armes disent tous leur « fierté d’avoir libéré la France » et la joie d’ « être reconnus après tant d’années ». Baptisé opération « Anvil-Dragoon », le débarquement de Provence mobilisa environ 120.000 de ces soldats issus des colonies sur un total de près de 500.000 HOMMES. [17] » Les titres des articles sont ainsi formulés : « La France honore les oubliés du débarquement de Provence. Au cours des cérémonies du 60 ème anniversaire, dimanche 15 août à Toulon, Jacques Chirac devrait rendre hommage aux anciens combattants originaires d’Afrique de l’Ouest et du Maghreb qui ont participé à la libération du pays en 1944 (.. ) » ; « Soixante ans après, devant la rade de Toulon, les vétérans africains retrouvent un amour perdu » ; « A Bordeaux, l’errance d’anciens combattants marocains, entre dénuement et amertume » ; « Les ordres étaient compris mais, entre eux, ils continuaient à parler arabe ». Un article plus historique précisait néanmoins que sur plus de 500.000 hommes placés sous le commandement du général américain Patch, 230.000 Français appartenaient à l’armée d’Afrique, parmi lesquels se trouvaient près de 120.000 « indigènes » originaires des colonies » [18], et un autre présentait « une armée de libération dominée par des anciens officiers de Vichy », tout en citant des propos plus nuancés de l’historien américain Robert Paxton [19]. Le journal du dimanche 15 et lundi 16 août affiche les mêmes thèmes : « Débarquement de Provence : la France retrouve sa mémoire de l’Afrique » [20], et publie l’opinion de Bachir Boumaza , « Les Algériens commémorent aussi le 15 août 1944 » [21]. Enfin, le journal du 17 août rend compte de la place réservée à la relation franco-algérienne dans cette commémoration : « M. Chirac honore Alger, « capitale de la France combattante », à laquelle il a décerné « en tant que capitale de la France combattante, la croix de la Légion d’honneur ». Le premier ministre Jean-Pierre Raffarin et sept autres membres du gouvernement ont assisté à la commémoration. Le ministre des affaires étrangères Michel Barnier a estimé que cette journée était « un événement considérable pour les relations franco-africaines », et le chef de l’Etat a reçu pour la première fois son homologue algérien au fort de Brégançon le lendemain 16 août pour évoquer les problèmes de coopération économique, civile et militaire [22].
Par la suite, quelques lettres de lecteurs furent publiées pour rétablir un minimum d’équité en corrigeant la minimisation de la part des Français d’Afrique du Nord et d’Algérie : « Les pages consacrées au débarquement en Provence, comme le discours du président de la République (Le Monde du 14 et celui daté 15-16 août) soulignent l’importance de la participation des Africains à la libération de la France mais escamotent la participation capitale des pieds-noirs à la première armée française, ou encore celle de l’encadrement traditionnel français des forces coloniales » [23]. Un autre lecteur précisa les effectifs mobilisés en 1914-1918, en 1940 et de 1942 à 1945 : « La plus forte contribution de la France d’outre-mer à l’armée française a eu lieu au moment de sa reconstitution en 1942-1944 avec l’apport de 550.000 hommes, dont 168.000 Européens d’Afrique du Nord (sur un peu plus d’un million d’habitants) et 173.000 Maghrébins et Africains. Cela relativise la part prise par les combattants d’outre-mer dans les deux conflits sans que soient remis en cause, pour autant, l’extrème qualité de ces troupes ni leur rôle décisif en plusieurs circonstances » [24].
En effet, l’objectivité de la version des faits présentée par le gouvernement et par Le Monde [25] (comme par beaucoup d’autres journaux) était très contestable. L’historien Yves Santamaria en a présenté quelques mois plus tard une analyse très critique, mais convaincante, sur la politique du gouvernement français et son attitude envers les nostalgiques de l’Algérie française : « La venue du président Bouteflika cristallise, aux yeux des associations de pieds-noirs et des harkis, une rancœur de longue haleine à l’heure où, en décorant la ville d’Alger, le gouvernement français apparaît à leurs yeux comme léguant au seul Etat algérien la part de mémoire qu’elles-mêmes jugent détenir, alors même que le monument aux morts de l’ancienne capitale de la France libre avait, au lendemain de l’indépendance, fait l’objet d’une damnatio memoriae sous la forme d’une chape de béton. Les autorités françaises ont délibérément choisi dans leur communication de privilégier la « pluralité des cultures » afin de mieux gommer l’apport de chacun. Le ressort des combattants est clairement la lutte contre la barbarie nazie. Le patriotisme, qui était notamment celui des Pied-noirs, n’est pas mentionné. Le combat de ceux qui sont tombés tendait, selon le discours officiel, à bâtir « un monde qui respecte la dignité et la diversité de chacun » [26]. On pourrait objecter que le président français avait voulu ainsi tenter d’influencer les décisions du gouvernement d’Alger à l’égard de ceux des Algériens qui n’avaient pas voulu renier leur participation aux combats des armées françaises dans la Deuxième guerre mondiale et après, jusqu’en 1962, mais le fait est que la version des événements qu’il a présentée dans cette commémoration relevait beaucoup plus de la mythologie que de l’histoire [27]. Est-il donc si difficile de rappeler la vérité, toute la vérité ?
Du côté algérien, quel furent les échos et les effets de cette politique ? Le président Bouteflika répondit à son homologue français en des termes soigneusement choisis, qui ne laissaient transparaître aucun désaccord de fond entre la célébration française du combat contre le nazisme et la célébration algérienne du combat anticolonialiste : « ce sacrifice n’a pas été vain puisqu’il a conduit en définitive à la fin de l’ère du colonialisme et permis à touscespays,quiavaientfournidescontingentspour165-186, participer à ces combats et aux libérations qui les ont couronnées, d’accéder à leur tour à l’indépendance et de connaître enfin la liberté » [28]. La presse algérienne minimisa l’obstruction d’une minorité d’élus colonialistes à la politique de réconciliation du président Chirac, tout en exprimant quelques réserves sur la modération algérienne envers les positions du gouvernement français [29]. On put lire des opinions favorables aux visites en Algérie des « pieds-noirs », voire à celles des harkis [30].
Quelques mois plus tard, à l’occasion du cinquantenaire du début de la guerre d’indépendance, Le Monde publia les résultats d’un double sondage très révélateur des divergences entre les opinions publiques française et algérienne : « Cinquante ans après, le fossé demeure entre Français et Algériens. Alors que vont commencer les commémorations de la guerre d’Algérie (1954-1962), une enquête CSA-RTL-Le Monde révèle l’existence de nombreux points de divergence enttre les deux peuples, tant sur le bilan de l’époque coloniale que sur la gestion de l’après-conflit ». Le plus frappant était la divergence des réponses à la question « La France devrait-elle présenter des excuses officielles au peuple algérien concernant son comportement durant la guerre d’Algérie ? », qui recueillait 88% de oui chez les Algériens et seulement 45% chez les Français [31]. Le lendemain au contraire, le même journal présenta une page affirmant sans nuance la volonté de rapprochement des responsables français : « Le renforcement de l’axe franco-algérien, priorité de Jacques Chirac. Le président de la République veut aboutir en 2005 à la signature d’un traité d’amitié entre la France et l’Algérie. Il souhaite que les rapports entre les deux pays aient le même « effet moteur » dans les relations Europe-Maghreb que le lien franco-allemand au sein de l’Union européenne » [32].
Mais à cette date, la négociation franco-algérienne du traité d’amitié était moins avancée que l’élaboration de la loi promise aux associations de rapatriés et de harkis. A la suite d’une déclaration d’intention déposée le 2 décembre 2003 à l’Assemblée nationale, annonçant sa volonté d’ « agir résolument sur toutes les questions, à la fois matérielles et symboliques, qui concernent nos compatriotes rapatriés », dans le cadre des « perspectives nées du voyage historique effectué récemment par le Président de la République en Algérie » [33] , le gouvernement Raffarin avait déposé le 10 mars 2004 un projet de loi « portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés » [34]. Ce projet ne consacrait qu’un seul article à leurs revendications mémorielles (« Article 1er : La Nation exprime sa reconnaissance aux femmes et aux hommes qui ont participé à l’œuvre accomplie par la France dans les anciens départements français d’Algérie, au Maroc et en Tunisie ainsi que dans les territoires placés antérieurement sous la souveraineté française »), et les cinq articles suivants à des indemnisations complémentaires. Mais la ministre définissait dans son discours l’esquisse d’une politique mémorielle, comportant notamment la création du Mémorial de la France d’Outre-mer à Marseille [35], et celle d’une fondation pour les harkis [36]. Elle expliquait que l’article 1er « répond au devoir de reconnaissance de la Nation à tous les hommes et les femmes qui, grâce à leur courage et leur goût d’entreprendre, ont participé au rayonnement de la France, ainsi qu’au développement des territoires sur lesquels ils se sont installés et ont fondé leurs familles », ajoutant que « pendant trop d’années, cette œuvre collective réalisée en Afrique du Nord et sur les autres continents a été niée ou ignorée, et il est temps aujourd’hui de la reconnaître. C’est aussi un devoir de réconciliation envers cette partie du peuple français ».
Plusieurs associations de rapatriés et de harkis ont fait déposer de nombreux amendements par des députés sympathisants pour formuler plus concrètement ces intentions. Même le parti socialiste, sous l’impulsion du député Kleber Mesquida, déposa une proposition de résolution « tendant à la création d’une commission d’enquête sur les responsabilités dans le massacre de nombreuses victimes civiles, rapatriés et harkis, après la date officielle du cessez-le-feu de la guerre en Algérie » [37]. La discussion du rapport déposé le 8 juin 2004 par le rapporteur Christian Kert [38] aboutit le 11 juin 2004 à l’adoption en pemière lecture d’une « petite loi » dans laquelle l’article 1er du projet se voyait multiplié par cinq, et un dernier article à caractère pénal s’ajoutait à la fin pour sanctionner la négation des crimes commis contre les harkis [39]. Telle était donc la situation au moment du discours présidentiel à Toulon le 15 août 2004. Puis le projet fut discuté en décembre par le Sénat, qui supprima l’article 7 jugé juridiquement discutable [40], et adopta une nouvelle version le 16 décembre 2004 [41]. Enfin, le 10 février 2005, l’Assemblée nationale adopta sans modification en deuxième lecture le texte modifié par le Sénat, qui devint la loi du 23 février 2005 [42]. Les résultats chiffrés des votes ne sont pas disponibles sur les sites internet des assemblées. On sait néanmoins que la nouvelle loi n’a pas été votée à l’unanimité, mais à la majorité. Les porte-paroles des quatre groupes parlementaires de l’Assemblée se sont prononcés ainsi le 10 février 2005 : M. Diefenbacher (UMP) et M. Salles (UDF) pour, M.Liberti (PCF) et M. Mesquida (PS) contre [43].
Le vote de cette loi fut aussitôt suivi, le 27 février 2005, par un important discours de l’ambassadeur de France en Algérie, Hugues Colin de Verdière, à l’Université de Sétif. Invité pour la signature d’une convention entre celle-ci et une université française, l’ambassadeur saisit l’occasion de faire l’éloge de l’ancien président du GPRA Ferhat Abbas, puis d’évoquer « une tragédie qui a particulièrement endeuillé votre région. Je veux parler des massacres du 8 mai 1945, il y aura bientôt 60 ans : une tragédie inexcusable. Fallait-il, hélas, qu’il y ait sur cette terre un abîme d’incompréhension entre les communautés, pour que se produise cet enchaînement d’un climat de peur, de manifestations et de leur répression, d’assassinats et de massacres ! » [44]
Ce discours produisit une très forte impression en Algérie, où il fut compris comme un premier pas de la France vers la reconnaissance tant attendue d’un crime contre l’humanité commis en son nom. Pourtant, une relecture attentive révèle un chef d’œuvre de style diplomatique, où l’on peut lire aussi bien le déchaînement tragique de violences réciproques des deux côtés. En tout cas, ce fut la dernière expression de la politique française de rapprochement avec l’Algérie, qui fut ensuite éclipsée par une remise en cause de sa cohérence avec la loi du 23 février 2005.
L’éclatement de la contradiction entre les deux politiques mémorielles de la France
La loi du 23 février 2005 suscita aussitôt une contestation du juriste Thierry Le Bars et de l’historien Claude Liauzu [45]. Celle-ci prit la forme d’une pétition, signée par six historiens [46], qui dénonçait l’article 4 (« Les programmes de recherche universitaire accordent à l’histoire de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, la place qu’elle mérite. Les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, et accordent à l’histoire et aux sacrifices des combattants de l’armée française issus de ces territoires la place éminente à laquielle ils ont droit. »), puis en tirait la conséquence : « Il faut abroger d’urgence cette loi, - parce qu’elle impose une histoire officielle, contraire à la neutralité scolaire et au respect de la liberté de pensée qui sont au cœur de la laïcité, - parce que, en ne retenant que le « rôle positif » de la colonisation, elle impose un mensonge officiel sur des crimes, sur des massacres allant parfois jusqu’au génocide, sur l’esclavage, sur le racisme issu de ce passé, - parce qu’elle légalise un communautarisme nationaliste suscitant en réaction le communautarisme de groupes ainsi interdits de tout passé », et concluait ainsi : « Les historiens ont une responsabilité particulière pour promouvoir des recherches et un enseignement - qui confèrent à la colonisation, à l’immigration, à la pluralité qui en résulte, toute leur place, - qui par un travail en commun, par une confrontation entre les historiens des sociétés impliquées rendent compte de la complexité de ces phénomènes, - qui s’assignent pour tâche l’explication des processus tendant vers un monde à la fois de plus en plus unifié et divisé. » [47] Cette pétition réunit plus de 1.000 signatures d’historiens et d’enseignants d’histoire en quelques mois. Elle provoqua une réaction du ministre Hamlaoui Mekachera, qui défendit la loi en niant le bien fondé de cette pétition dans Le Monde du 8 mai 2005 [48].
Mais dans une deuxième étape, les Algériens réagirent à leur tour contre cette loi. Les associations et les journaux algériens avaient commencé par accueillir très positivement la déclaration de l’ambassadeur de France à Sétif, y voyant une étape capitale vers une demande de pardon de la France à l’Algérie [49], alors que les autorités se gardaient encore de tout commentaire [50]. Le 8 mai, le président Bouteflika haussa brutalement le ton dans son discours de commémoration à Sétif : « Les massacres du 8 mai 1945 étaient-ils la récompense des Algériens pour avoir défendu héroïquement la France (...) ? Qui ne se souvient des fours de la honte installés par l’occupant dans la région de Guelma (...) ? Ces fours étaient identiques aux fours crématoires des nazis [51] ». La presse algérienne lui emboîta le pas : « Pour la première fois depuis l’indépendance, l’Etat algérien demande officiellement à l’Etat français de reconnaître ses crimes coloniaux et de demander pardon pour les souffrances imposées au peuple algérien durant les 132 ans d’occupation. Ce qui a toujours été la revendication de la société civile à travers les associations des victimes des atrocités coloniales est désormais une demande officielle formulée par le président de la République. (...) La réconciliation entre les deux pays passe ainsi par la reconnaissance par l’agresseur de ses crimes et par sa repentance. Autrement, aucune page de l’histoire ne serait tournée et aucune réconciliation n’est possible entre les peuples » [52].
Un deuxième fait vint encore aggraver la perte de confiance des Algériens dans les intentions du gouvernement français : le changement de gouvernement de la fin mai, dans lequel le ministre des Affaires étrangères Michel Barnier, responsable du projet de traité d’amitié, fut remplacé (à son grand mécontentement) par Philippe Douste-Blazy. Ce dernier était connu à Alger comme co-auteur d’une proposition de loi déposée en mars 2003 à l’Assemblée nationale et tenant en un article unique : « L’œuvre positive de l’ensemble de nos concitoyens qui ont vécu en Algérie pendant la période de la présence française est publiquement reconnue » [53] ; idée reprise dans la loi du 23 février 2005.
Dans ces conditions, les autorités comme la presse algérienne multiplièrent les manifestations de mécontentement. Fin juin, le président Bouteflika déclara que la loi du 23 février 2005 représentait « « une cécité mentale confinant au négationnisme et au révisionnisme ». Le 7 juillet, les deux chambres du Parlement algérien la condamnèrent. Le 25 août, le président rappela aux Français « qu’ils n’ont pas d’autre choix que de reconnaître qu’ils ont torturé, tué, exterminé de 1830 à 1962, qu’ils ont voulu anéantir l’identité algérienne » [54]. Le 28 août, il déclara que l’objectif du traité d’amitié était toujours à l’ordre du jour, mais qu’il ne se ferait que « dans le respect mutuel » [55]. Du côté français, on observe peu de signes de tentatives de relance, à part la proposition du ministre Douste-Blazy le 26 juillet : « Je souhaite qu’il y ait une commission d’historiens mixte, algériens et français, qui puissent se réunir, travailler ensemble, en toute indépendance, pour nous faire une proposition sur cela » [56]. On peut néanmoins supposer que le président Bouteflika avait voulu répondre à une demande française en faisant une déclaration en faveur des harkis lors d’un meeting de sa campagne référendaire le 8 septembre à Oran, où il avait déclaré que le traitement du dossier de leurs familles après l’indépendance était « l’une des plus graves erreurs commises dans le passé », qui avait « porté préjudice au pays », et qu’une bonne partie de la crise qu’avait connue le pays était due à cette grave erreur » [57]. Mais l’un de ses ministres, Saïd Barkat, l’a peu après démenti : « La majorité du peuple algérie est contre la venue des harkis en Algérie, car ce sont des traîtres à leur pays et à leur nation. Quant à leurs enfants, ils seront les bienvenus à condition qu’ils reconnaissent de facto les crimes de leurs parents » [58].
« Une Algérie apaisée ? » demandait l’éditorial du Monde le 1er octobre 2005, après le reférendum algérien du 29 septembre [59]. Le journal critiquait la nouvelle charte de réconciliation nationale pour avoir voulu « tirer un trait sur une décennie de guerre civile sans examiner les causes du délitement de la société algérienne et les responsabilités des uns et des autres, y compris du pouvoir ». Et il osait suggérer que « le président Bouteflika échapperait plus facilement au reproche d’avoir monté une opération politique si, dans le même temps, il n’exigeait que la France se soumette au « devoir de mémoire » à propos de la période coloniale. Entre les deux rives de la Méditerranée, il y a aussi un problème de réconciliation. Elle passe par un travail commun sur un passé commun, dans lequel les déclarations unilatérales de bonne conscience sur le « rôle positif » du colonialisme - du côté français - ou les comparaisons entre la présence française outre-mer et l’occupation nazie - du côté algérien - n’ont pas leur place. La réconciliation nationale à l’intérieur et la consécration officielle de l’amitié franco-algérienne par un traité, en suspens depuis des années, supposent au contraire de jeter un regard lucide sur une histoire que les jeux politiciens ont rendue encore plus tragique ».
En fait, la presse algérienne continua de suivre avec irritation les débats de plus en plus chaotiques opposant les forces politiques française au sujet de la mémoire nationale [60], marqués par l’entrée en scène du parti socialiste (voulant faire oublier son attitude trop modérée lors des débats parlementaires de 2004), et surtout des élus antillais qui se crurent directement concernés par la loi du 23 février 2005. Le président de la République chargea le président de l’Assemblée nationale, Jean-Louis Debré, de trouver une solution, qui consista en l’annulation par décret du passage le plus litigieux de l’article 4 de la loi. L’Algérie, dont le président fut hospitalisé en France et y séjourna durant presque tout le mois de décembre, ne joua aucun rôle visible dans cette issue. Peu avant, la correspondante du Monde à Alger notait pourtant un relatif optimisme chez les responsables français de la négociation du traité : « L’aspect technique est bouclé depuis longtemps. Ce qui bloque, c’est l’habillage politique », estime-on à l’Elysée et au Quai d’Orsay. « La volonté des deux parties d’aboutir n’est pas remise en cause. Bouteflika et Chirac savent qu’il ont une opportunité historique à saisir, mais les ajustements politiques sont délicats ». Les points d’achoppements étaient l’abrogation de la loi du 23 février, « impossible dans l’immédiat », et la reconnaissance de la tragédie des harkis, souhaitée comme compensation par le président Chirac, mais faisant hésiter le président Bouteflika par son aspect « explosif » dans son pays [61]. Un mois plus tard, peu avant le retour à Alger du président algérien, le même journal notait que « les relations avec la France ne cessent de se détériorer », notamment à cause d’un sondage CSA paru dans Le Figaro, suivant lequel deux tiers des Français approuveraient l’article contesté de la loi du 23 février 2005. Mais les responsables politiques admettaient que ce traité finirait par être signé tôt ou tard, et qu’alors la population algérienne s’inclinerait [62].
Au début de 2006, le président Chirac persistait à présenter le traité franco-algérien - pour lequel il avait abandonné le passage le plus contesté de la loi du 23 février 2005 - comme un objectif capital : « Si l’année 2005 a été celle d’un grand rendez-vous manqué entre la France et l’Algérie, 2006 se présente sous les airs des retrouvailles ». Paris et Alger travaillent « afin qu’un traité d’amitié vienne consacrer, dans un esprit d’équité et d’ouverture, cette relation nouvelle, confiante et durable qui est de l’intérêt de tous », a indiqué Jacques Chirac le 10 janvier 2006 ». [63]. Mais au début de mars, un intellectuel français venu participer à un cycle de débats à Alger estimait au contraire que « la normalisation entre l’Algérie et la France ne pourra se réaliser dans le contexte actuel », caractérisé par le décalage dans la compréhension de l’histoire entre les deux opinions française et algérienne. Les deux derniers sondages effectués en France ont montré que plus de 60% des Français étaient favorables au contenu de la loi du 23 février 2005, notamment son article 4. Il me semble qu’on ne peut pas parler de normalisation, s’il y a un décalage dans la conception de cette page de l’histoire entre les deux opinions » [64]. Et l’historien algérien Daho Djerbal, sans justifier le moins du monde la loi française du 23 février 2005, critiquait sévèrement l’insincérité de l’attitude officielle algérienne, qui lui semblait camoufler une défaite complète du parti de l’indépendance totale en Algérie [65].
A la fin avril 2006, le projet de traité d’amitié franco-algérien, présenté par le gouvernement français comme naturel en 2004, semble ajourné pour une durée imprévisible. Pour qui connaissait l’histoire de la revendication algérienne de repentance de la France depuis 1990, cet échec au moins temporaire n’a rien de surprenant : ce qui est surprenant, c’est l’optimisme démesuré affiché par la partie française en 2004, et son inconscience apparente de la contradiction entre la loi du 23 février 2005 et la revendication algérienne de repentance, dont le président Bouteflika a fait à partir du 8 mai 2005 la condition impérative de la conclusion du traité. Cette condition est-elle acceptable ? La signature d’un traité unilatéral, allant beaucoup plus loin que les accords bilatéraux d’Evian, peut-elle se faire sans donner aux Français l’impression d’une capitulation sans conditions analogue à celle qui fut imposée à l’Allemagne nazie par ses vainqueurs ? Il appartiendra aux politiques et aux citoyens français d’en décider à partir d’une réflexion plus sérieuse et plus lucide que celle qu’ils ont eue - ou n’ont pas eue - jusqu’à présent sur cette question capitale.
Guy Pervillé
[1] Voir notamment mon article « La revendication algérienne de repentance unilatérale de la France », et tout récemment ma conférence prononcée à Berlin le 29 avril 2005 sur « Le 8 mai 1945 et sa mémoire en Algérie et en France », sur mon site internet http://guy.perville.free.fr.
[2] Pour plus de détails, voir notre article « Le Maghreb à la fin de la guerre », Historiens et géographes, n° 348, mai-juin 1995, pp. 267-277, et notre livre Pour une histoire de la guerre d’Algérie, Paris, Picard, 2002, pp. 110-116.
[3] « Contexte d’une naissance. Contre l’assassinat de la mémoire », cité par le mémoire de maîtrise d’histoire de Michaël-Lamine Tabraketine, La commémoration du 8 mai 1945 à travers la presse française et algérienne, Université de Toulouse-Le Mirail, 2000, p. 51.
[4] El Moudjahid, 3 mai 1995, cité par Tabraketine, op. cit., p. 62.
[5] Interview de Bachir Boumaza, cité par Ahmed Rouadjia, « Hideuse et bien-aimée, la France... », in Panoramiques, n° 62, 1er trimestre 2003, pp. 210-211.
[6] N° du 9 mai 1995.
[7] N° du 9 mai 1995.
[8] N° du 8 mai 1999.
[9] Cité dans El Watan, 15 juin 2000, p. 1.
[10] Discours de M. Hubert Colin de Verdière, ambassadeur de France en Algérie, à l’Université de Sétif, dimanche 27 février 2005. Site internet : www.ambafrance-dz.org.
[11] La loi du 23 février 2005 sur les rapatriés et les harkis a été à l’origine de polémiques dont nous reparlerons. Voir nos premières analyses sur notre site internet http://guy.perville.free.fr, rubrique « Mises au point », et notre deuxième communication au présent colloque.
[12] Voir l’article de Florence Beaugé, « Algérie, victoire et fraude incontestables », Le Monde, 16 avril 2006, pp. 1 et 16.
[13] Voir mon exposé du 7 avril 2004 sur « La date commémorative de la guerre d’Algérie », dans les Cahiers d’histoire immédiate, n° 26, automne 2004, pp. 61-70, et sur mon site internet http://guy.perville.free.fr.
[14] Article d’Yves Bordenave, « L’invitation de M. Bouteflika à la commémoration du débarquement de Provence crée une polémique à l’UMP », in Le Monde, 10 août 2004, p. 8.
[15] Jeremy Tordjman, « M. Barnier juge « légitime » la venue de M. Bouteflika le 15 août à Toulon », in Le Monde, 13 août 2004, p. 7.
[16] Editorial « Commémorations », in Le Monde, 10 août 2004, p. 14.
[17] Le Monde, samedi 14 août 2004, p. 6 (dossier commémoration, pp. 6 et 7). La typographie du journal est respectée.
[18] Yves Bordenave, « 15 août 1944, 3 h 50, l’opération « Anvil-Dragoon » commence », Ibid., p. 7.
[19] Article de Nicolas Weil, Ibid., p. 7.
[20] Le Monde, dimanche 15 et lundi 16 août, p. 7. Voir aussi l’interview de l’historien et cinéaste Grégoire Georges-Picot : « Goumiers, tirailleurs ou spahis, « ces gens ont cru en la France et ses sentent abandonnés », et l’article « Quand Chirac, 11 ans, offrait à boire aux libérateurs ».
[21] Le Monde, ibid., p. 11. « Travailler à la refondation des rapports entre l’ancienne puissance occupante et son ancienne colonie est une entreprise nécessaire et louable. Mais elle ne doit pas être fardée ou tronquée par des besoins conjoncturels. La refondation des relations franco-allemandes n’a pas mis fin à la commémoration des massacres d’Oradour-sur-Glane ou au souvenir de l’exécution de Jean Moulin », prévient-il. « Il en est de même pour nous lorsque nous évoquons le souvenir des massacres du 8 mai 1945 ou de l’assassinat déguisé en suicide du combattant nationaliste Larbi Ben M’hidi ».
[22] Le Monde, 17 août 2004, p. 6. La préparation d’un traité d’amitié entre la France et l’Algérie est mentionnée à propos des déclarations de M.Raffarin.
[23] « L’histoire de l’armée d’Afrique », lettre de Georges Grimal, in Le Monde, 25 août 2004, p. 17.
[24] « La guerre en chiffres », lettre de Claude Ascensi, in Le Monde, 31 août 2004, p. 31.
[25] En tant qu’abonné au Monde, j’estime avoir le droit de juger que son attitude sur cette question est celle d’un journal d‘opinion beaucoup plus que d’information, et que son opinion paraît refléter sans esprit critique celle du gouvernement français à l’époque.
[26] Yves Santamaria, Institut d’Etudes politiques de Grenoble, « C’est nous les Africains. La place des populations d’Afrique du Nord dans la libération de la France (1945-2005) », in Les médias et la Libération en Europe, 1945-2005, s.dir. Christian Delporte et Denis Maréchal, Paris, L’Harmattan, 2006.
[27] Et notamment parce que les nationalistes radicaux du Parti du Peuple Algérien (PPA) étaient contre la participation des Algériens à la guerre des Français, voire préparaient une insurrection contre eux avec ou sans l’aide des Allemands. Le CARNA (Comité d’action révolutionnaire nord-africain), favorable à une alliance avec ceux-ci, fut exclu du PPA dès mai 1939, mais réintégré en 1943. La victoire allemande sur la France incita d’autres groupes de militants à préparer un futur soulévement à partir de juin 1940. Voir notamment la « lettre à Mohammed Lamine Debaghine » de Chawki Mostefaï, dans El Watan, sur le site http://www.elwatan.com/print.php3 ?id_article=8089 (imprimé le 10/12/2004), et Awal, Cahiers d’études berbères, n° spécial « Hommage à Mouloud Mammeri », 1990. Bachir Boumaza a camouflé ces faits dans son article du Monde, 15-16 août 2004, p. 11 (« Exception faite pour la dernière, où les élites algériennes se sont déterminées avec une certaine unanimité contre le nazisme, « plus grand mal que le colonialisme », il y eut une résistance à la conscription, en particulier durant la première guerre mondiale »).
[28] El Moudjahid, 16 août 2004.
[29] Dans La Tribune du 16 août, Chafik Benhacène rappelait « le traumatisme qu’aura représenté pour la communauté algérienne la conscription et l’appel sous le drapeau français », et critiquait la modération algérienne sur les revendications françaises en faveur des harkis, dictée par « l’option stratégique d’une refondation des relations algéro-françaises appelées à se conforter par la proche signature d’un traité d‘amitié historique. Pourtant, il n’est pas acquis que l’option du silence sur des questions légitimement vécues comme sensibles par de larges secteurs de la société algérienne soit la plus opérante. La référence, dans la lettre du ministre français à la « libre circulation des harkis » contrevient aux positions officielles de l’Algérie sur la question et appelle à tout le moins des clarifications algériennes qui ne peuvent se contenter de la convenue « affaire franco-française » ». Dans Le quotidien d’Oran du 17 août, Maâchou Blidi se réjouissait de la décoration remise à la ville d’Alger : « Oui, elle fut bien capitale de la résistance pour les dirigeants de la France libre. Comme elle a été, hélas, pour la France civilisée, la capitale de la torture pratiquée à la chaîne ».
[30] « Le retour de Gaston », par Maâchou Blidi, dans Le quotidien d’Oran, 15 septembre 2004 ; et « Les oubliés de la réconciliation » par Maâmar Farah, Le soir d’Algérie, 12 août 2004 (« Que la réconciliation, brandie comme un programme politique, n’oublie pas ces Algériens privés de leur pays ! Sinon, elle resterait inachevée... »).
[31] Le Monde, 30 octobre 2004, p. 10. Sondage réalisé les 13, 14 et 15 octobre auprès d’un échantillon représentatif de 1.005 Français et du 11 au 14 octobre auprès d’un échantillon représentatif de 1.054 Algériens.
[32] Le Monde, 31 octobre - 1er novembre 2005, p. 8. Les deux autres articles présentaient une interview du ministre délégué à la coopération Xavier Darcos (« J’ai senti une véritable « demande de France » de la part de l’Algérie »), et une enquête très optimiste suivant laquelle « les députés pieds-noirs se félicitent du rapprochement », précisant néanmoins que « certains de ces parlementaires se montrent plus réservés à l’égard de M. Bouteflika ».
[33] Déclaration du gouvernement sur les rapatriés, enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 2 décembre 2003, n° 1265. http://www.assemblee-nat-fr/12/dg/dg1265.asp.
[34] Projet de loi n° 1499, présenté au nom de M. Jean-Pierre Raffarin par Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense. http://www.assemblee-nat-fr/12/projets/pl1499.asp.
[35] « Reconnaître l’œuvre positive de nos compatriotes sur ces territoires est un devoir pour l’Etat français : ce sera notamment la vocation du mémorial de la France d’Outre-Mer ». Ce vieux projet a été mis en œuvre par le maire de Marseille Jean-Claude Gaudin, avant que l’Etat s’y joigne. Son comité scientifique, présidé par Jean-Pierre Rioux, avec Jean-Jacques Jordi comme principal responsable, comprend de nombreux historiens.
[36] « Une fondation sera créée pour assurer la vérité de leur histoire, comme celle de la guerre, la pérennité de leurs traditions, et veiller à défendre leur honneur et leur dignité. Elle prendra dans ces domaines la suite des administrations spécifique ».
[37] Proposition de résolution n° 1637, enregistrée le 3 juin 2004, présentée par Kléber Mesquida et 80 membres du groupe socialiste, représentant tous les membres du groupe socialiste et apparentés. http://www.assembleenationale.fr/12/propositions/pion1637.as.
[38] Rapport fait au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur le projet de loi (n° 1499) portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des français rapatriés par M. Christian Kert, député. http://www.assembleenationale.fr/12/rapports/r1660.as.
[39] Texte adopté n° 306. L’article 7 (nouveau) déclarait : « Après l’article 23 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, il est inséré un article 23 bis ainsi rédigé : « Art. 23 bis : Les dispositions des articles 23, 24, 48-2 et 65-3 sont applicables aux crimes commis contre les harkis et les membres des formations supplétives après le cessez-le-feu du 19 mars 1962 ».
[40] Dans le débat du 8 décembre 2004, M. André Lardeux fit part de son désaccord avec l’article 7 qui, « s’inspirant de la loi Gayssot de 1990, conduit à restreindre la liberté d’expression », et a « estimé qu’il ne revenait pas au législateur de définir ce que doit être la vérité historique ». Le rapporteur M. Alain Gournac lui a fait part de ses doutes sur l’opportunité de maintenir le principe de l’article 7, et a précisé qu’il proposerait d’en modifier la rédaction ». http://www.senat.fr/commission/soc/soc041211.html#toc1.
[41] Projet de loi n° 35. http://www.senat.fr/leg/tas04-035.html.
[42] Texte adopté n° 389. http://www.assembleenationale.fr/12/ta/ta0389.asp.
[43] Voir les explications de vote sur le site http://www.assemblee-nationale/12/cra/2004-2005/146.asp. Le clivage politique n’allait pourtant pas de soi au début des débats, et le président du groupe UMP, Bernard Accoyer, rappelle que le parti socialiste a voté pour l’article 4 à l’Assemblée nationale en juin 2004 et au Sénat en décembre 2004. Au contraire, le sénateur communiste Guy Fischer exprima un désaccord de fond avec plusieurs articles du projet et annonça le vote contre de son groupe le 8 décembre 2004.
[44] Texte complet sur le site http://www.ambafrance-dz.org.
[45] Voit Claude Liauzu, « Colonialisme, esclavagisme : les enjeux de mémoire », Libération, 23 février 2005, Thierry Le Bars et Claude Liauzu, « Et l’histoire de la présence française outre-mer ? », L’Humanité du 10 mars 2005, et l’article de Thierry Le Bars publié dans le Recueil Dalloz du 24 mars 2005, republié comme les précédents sur le site internet de la Ligue des droits de l’homme de Toulon (http ;//www.ldh-toulon.net).
[46] Claude Liauzu, Gilbert Meynier, Gérard Noiriel, Frédéric Régent, Trinh Van Tao, Lucette Valensi.
[47] Texte daté du 24 mars 2005 sur le site de la LDH de Toulon, http ;//www.ldh-toulon.net, php3 ?id_article=555, et publié dans Le Monde du 25 mars 2005.
[48] Hamlaoui Mekachera, « Colonisation : réconcilier les mémoires », Le Monde, 8 mai 2005, p. 16. Reproduit sur le site de la LDH de Toulon, http ;//www.ldh-toulon.net, php3 ?id-article=635.
[49] Voir l’article de Florence Beaugé, « Paris reconnaît que le massacre de Sétif en 1945 était « inexcusable ». Associations et journaux réclament une « demande de pardon » », Le Monde, 10 mars 2005, p. 5.
[50] « Vis-à-vis de la France et de son rapport à l’histoire coloniale, le ton des journaux est plus critique que celui des officiels, tout à la préparation d’un traité d’amitié franco-algérien prévu pour 2005. C’est d’ailleurs autant à la France qu’au gouvernement algérien que l’éditorial d’El-Khabar hebdo s’adresse, en estimant qu’ « une demande de pardon doit précéder le traité d’amitié » » (« L’Algérie rend hommage à ses martyrs », Le Monde, 8-9 mai 2005, p. 10).
[51] Le Figaro, pp. 1 et 3, 10 mai 2005, et Sud-Ouest, 11 mai 2005, p. 1-4.
[52] « La France appelée à solder ses comptes avec l’histoire », par Abdelkrim Ghezali, La Tribune, 9 mai 2005. Voir aussi « Préalable », par Tamani Salim, Liberté, 8 mai 2005, et « La France va-t-elle reconnaître son génocide ? », par A. Abdelghafour, La Nouvelle République, 10 mai 2005.
[53] Proposition de loi déposée le 5 mars 2003 par MM. Léonetti, Douste-Blazy, et 109 autres députés. Cette proposition avait provoqué le 27 juin 2003 une réponse indignée, « Non à l’occultation des crimes coloniaux français », dénonçant la colonisation française comme « une succession terrible de crimes contre l’humanité » (voir sur le site de la LDH de Toulon, http///www.ldh-toulon.net, php3 ?id_article=566). Cf. Le Monde, 11 juin 2005, p. 1 et 2 (« M. Douste-Blazy et le travail de mémoire »).
[54] Florence Beaugé, « Alger pose ses exigences pour le traité d’amitié avec Paris », Le Monde, 30 août 2005, p. 3.
[55] Ibid.
[56] « Algérie-France : M. Douste-Blazy réclame une commission d’historiens », dépêche AFP, Le Monde, 28 juillet 2005, p. 4.
[57] « L’Algérie fait son mea culpa vis-à-vis des harkis », 9 septembre 2005, http://www.harkis.info/portail/article.php ?sid=44.
[58] Florence Beaugé, « Les fils de harkis sont invités à rentrer à Alger mais à s’excuser », Le Monde, 17 septembre 2005, p. 3.
[59] Le Monde, 1er octobre 2005, p. 18.
[60] Voir plus loin notre deuxième communication : « La confrontation mémoire-histoire en France depuis un an (2005-2006).
[61] Florence Beaugé, « Le traité d’amitié franco-algérien ne devrait pas être signé cette année », Le Monde, 26 novembre 2005.
[62] Florence Beaugé, « Alger se prépare au retour de M. Bouteflika », et « Les relations avec la France ne cessant de se détériorer », Le Monde, 31 décembre 2005, p. 4.
[63] Yacine Kenzy, « Loi du 23 février. Le texte réécrit « courant février » », Liberté, 14 janvier 2006.
[64] Gilles Manceron, vice-président de la Ligue des droits de l’homme, dans le compte-rendu des débats d’El Watan commencés le 2 mars à Alger, El Watan, 4 mars 2006. Repris sur le site de la LDH de Toulon, http///www.ldh-toulon.net, php3 ?id_article=1204. NB : La validité de cette analyse a été confirmée par l’échec de la première visite du ministre français des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, à Alger. Voir notamment Florence Beaugé, « M. Douste-Blazy à Alger alors que le traité d’amitié franco-algérien est en panne », et « Algérie-France, les leçons d’un malaise », Le Monde, 11 avril 2006, p. et 15 avril 2006. Le projet semble ajourné sine die par la volonté d’Alger. Une escalade verbale s’est même produite à partir de nouvelles déclarations du président Bouteflika qui ont suscité des réactions défavorables du ministre Douste-Blazy et du président de l’Assemblée nationale Jean-Louis Debré.
[65] Daho Djerbal, « La nostalgie de l’époque coloniale est, malheureusement, réelle en Algérie », interview réalisée le 3 janvier 2006 par Yassin Tamzali pour le site babel/Med (http://www.babelmed.net), et reprise sur le site de la LDH de Toulon http://www.ldh.toulon.net/imprimer.php3 ?id_article=1129.