Annuaire de l’Afrique du Nord 1981

(Rédaction : été 1982. Publication : 1983)
vendredi 10 août 2007.
 

V. - HISTORIOGRAPHIE DE LA GUERRE D’ALGÉRIE [1]

L’historiographie de la guerre d’Algérie présente, cette année, des caractères originaux. Pour la première fois, sur onze titres nouveaux - quantité inchangée depuis l’année précédente - les auteurs algériens sont aussi nombreux que les auteurs français (cinq de chaque côté, le onzième étant américain). D’autre part, la diversité des tendances n’a jamais été aussi grande, surtout parmi nos compatriotes, où l’on ne trouve plus qu’un seul défenseur de l’Algérie française. Ce rééquilibrage est de bon augure, s’il n’annonce pas un déséquilibre inverse.

Parmi les contributions algériennes, on distinguera d’abord trois études historiques, dont les auteurs ont milité plus ou moins jeunes dans les rangs du FLN, et ont tous adopté l’idéologie marxiste. Autre nouveauté remarquable, deux sur trois sont publiés en Algérie.

1° HARBI (Mohammed) : Les Archives de la Révolution algérienne. Paris, Éditions Jeune Afrique, 583 p. (dont annexes).

Après le FLN, mirage et réalité, publié l’an dernier par les mêmes éditions, Mohammed Harbi présente en un gros volume les documents qu’il a utilisés et ceux qui lui ont été confiés ultérieurement. Ce n’est pas un choix de textes, mais, à part quelques-uns déjà connus dont l’importance imposait la présence, l’ensemble des documents inédits et authentifiés que l’auteur possède. Son but est de mettre à la disposition du public algérien le maximum de traces de son passé, afin que celui-ci redevienne « le patrimoine de chacun », et permette « une réflexion collective sur les problèmes actuels de l’Algérie ». Dans cette perspective « les archives de la révolution algérienne ne doivent pas rester le monopole de gardiens jaloux, hommes du pouvoir, ou opposants ». On ne peut qu’approuver l’auteur de livrer ses sources à l’examen d’autres chercheurs, qui pourront en tirer, éventuellement, d’autres conclusions que les siennes.

Un autre mérite de cet ouvrage est de ne pas confondre l’histoire de la révolution algérienne avec celle du FLN : par refus du « fatalisme », il prend en compte « toutes les virtualités inhérentes au processus historique », sans oublier de « jauger les capacités non déployées ou gaspillées ». C’est ainsi qu’une première partie (« les voies de la révolution », 1948-1957) rassemble des textes représentatifs des trois tendances du MTLD, puis du FLN, des forces qui le rejoignent (UDMA, Oulémas), ou qui négocient leur alliance avec lui (le PCA) ; mais aussi de son rival le MNA. Le point de vue longtemps occulté de celui-ci est largement exposé dans des documents qui montrent l’importance des messalistes en France et même en Algérie jusqu’en 1957 ; mais qui révèlent aussi clairement l’intransigeance quasi-paranoïaque de leur chef, apparemment persuadé de détenir le monopole de la pureté révolutionnaire. Des textes plus tardifs retracent le déclin irrémédiable du MNA, écartelé entre les attractions contraires du FLN (que rejoignent les « glaouistes ») et du gouvernement français (que servent les « fadistes ») pendant que le cercle des derniers fidèles se réduit aux dimensions d’une secte.

Dans cette première partie et dans les suivantes, de nombreux documents exposent les difficultés internes et externes du FLN, qui grandissent en même temps que se développe la lutte. On peut suivre la longue crise ouverte par le Congrès de la Soummam (août 1956) et provisoirement refermée par l’assassinat d’Abane Ramdane (décembre 1957) ; puis la recherche d’une nouvelle stratégie à travers l’organisation et la proclamation du GPRA (printemps-été 1958) ; la rechute dans la crise de l’exécutif, péniblement surmontée par le CNRA de décembre 1959-janvier 1960 ; enfin la crise finale ouverte par la démission de l’État Major Général en juillet 1961 et aboutissant un an plus tard à l’éclatement du FLN.

Un troisième ensemble de documents est consacré à la politique extérieure du GPRA dans ses aspects généraux et régionaux. Ces textes démontrent la vanité de la théorie militaire française de la « subversion ». Si en effet le FLN dut recourir à une diplomatie de plus en plus active pour compenser en partie l’infériorité de ses forces à l’intérieur, par des appuis extérieurs moraux et matériels (argent, ravitaillement, armes et munitions, voire « spécialistes » et volontaires), il ne fut jamais l’instrument d’aucune puissance étrangère. Son action reposait sur le principe de solidarité, c’est-à-dire sur la convergence des intérêts, mais l’expérience prouva que ceux-ci restaient toujours distincts. La meilleure illustration se trouve dans les relations maghrébines, particulièrement difficiles après l’échec de la conférence de Tunis (juin 1958) ; on regrette l’absence de textes sur les rapports avec l’Égypte, qui révèleraient sans doute les mêmes discordances. De même la plupart des États socialistes, même la Yougoslavie, se firent prier pour reconnaître le GPRA et pour lui accorder une aide proportionnée à ses besoins : seuls la Chine et ses voisins asiatiques lui en promirent une illimitée et sans condition (sinon celle de s’en servir). On comprend que le GPRA ait résisté à la tentation de l’alignement, qui l’exposait au risque démesuré d’une rupture avec ses hôtes tunisiens et marocains. Par comparaison, les relations algéro-africaines, sans fondement historique, semblent décevantes. On aimerait trouver d’autres textes sur la politique arabe, musulmane, afro-asiatique, et tiers-mondiste du FLN.

Tel qu’il est, ce recueil offre à ses lecteurs, algériens ou non, l’occasion de découvrir et d’apprécier par eux-mêmes, dans cet autoportrait sans fard des « chefs historiques » et de leurs conseillers, « le tableau le plus éclatant de la révolution algérienne », comme l’écrit Charles-Robert Ageron dans sa postface.

2° CHIKH (Slimane) : L’Algérie en armes, ou le temps des certitudes. Paris, Economica, et Alger, Office des Publications Universitaires, 511 p.

Plus jeune, mais également engagé dans la lutte de libération nationale par son origine familiale et par son choix personnel, Slimane Chikh a suivi, comme Mohammed Harbi et nombre d’autres intellectuels algériens, l’attraction d’un marxisme « tiers-mondisé », débarrassé de son européo-centrisme originel. Il publie sous une forme allégée et réécrite sa thèse de doctorat en Sciences Politiques soutenues à Grenoble en 1975, dont le titre initial (« La révolution algérienne, projet et action ») exprime bien la visée, parallèle à celle de Mohammed Harbi (« le FLN, mirage et réalité »), mais sur un ton beaucoup moins iconoclaste. L’auteur semble poursuivre un difficile équilibre entre « la volonté de relativiser les choses » et « une foi naguère bardée de certitudes ». Il croit possible « de soumettre les certitudes inébranlables à l’épreuve du doute et de substituer au récit triomphaliste de l’épopée le bilan lucide et sans complaisance », d’examiner les faits avec un « minimum d’esprit critique » sans prétendre au « détachement souverain » du « point de vue de Sirius ».

Ce travail n’est pas proprement historique dans la mesure où il ne repose pas sur la recherche de sources documentaires nouvelles ; il l’est cependant, à plus d’un titre. L’auteur part d’une double insatisfaction : devant l’indigence de l’historiographie officielle algérienne, faite d’articles et de discours édifiants et polémiques ; devant l’écrasante surabondance d’une historiographie française mal équilibrée, qui déforme ou laisse dans l’ombre la plus grande partie des faits vécus. Il commence par un long chapitre préliminaire (« le champ historique », 1830-1954, et « chronique des événements », 1954-1962), qui atteste une maîtrise peu commune d’une immense bibliographie. Puis il développe en quatre parties (« la violence », « l’intégration nationale », « la légitimité nationale », « le domaine international ») ordonnées suivant le schéma actionnaliste d’Alain Touraine, son interprétation du processus historique d’émergence de la nation algérienne, en confrontant systématiquement le projet du FLN et les réalités (même contradictoires). Il montre ainsi, avec une honnêteté irréprochable, comment la nation algérienne s’est constituée dans sa confrontation avec l’Autre, en dépassant, mais sans les résoudre, ses contradictions internes. Sa conclusion est, en somme, la même que celle de Mohammed Harbi : le populisme de la « classe moyenne » au pouvoir ne pourra empêcher le développement de la lutte des classes ; la « dynamique interne » prendra la relève de la « dynamique externe ».

Cet « état de la question » rendra service aux historiens, qui apprécieront avec respect le poids de l’œuvre accomplie. La thèse elle-même, globalement convaincante, demande pour être suivie dans toutes ses nuances une culture sociologique et philosophique d’un haut niveau. Nous laisserons aux spécialistes de Science Politique le soin de l’analyser dans sa perspective propre. Pour notre part, plutôt que de passer en revue toutes les questions d’histoire qu’elle soulève, nous préférons nous pencher de plus près sur les pages qui nous ont inspiré les réactions les plus vives, mêlées de contentement et d’insatisfaction, au risque de donner nous aussi dans la subjectivité.

Il s’agit du deuxième chapitre de la première partie, consacré à « la violence du colonisé » (opposée à celle du colonisateur). Si la théorie de la « violence révolutionnaire » dont elle se réclame (pp. 215-217) nous semble pouvoir s’appliquer à toute violence libératrice, toute résistance armée à l’oppression, nous sursautons en rencontrant les thèses de Fanon et de Hegel (p. 218) : « La violence collective ne tue pas des hommes, mais des symboles. Elle poursuit la mort du colonisateur en tant que représentant d’un système oppressif et en même temps celle du colonisé en tant que sujet soumis à la servitude. La mort physique n’est pas la fin dernière de la violence collective des colonisés, mais simplement le tribut payé pour détruire une impossibilité ontologique ; le refus du non-être. Ainsi, la violence qui tue devient une violence qui donne la vie, qui engendre ; C’est une ontophanie » [... ]. Poussée à ce point, la virtuosité philosophique verse dans le sophisme. Le bon sens répond qu’on n’a jamais amélioré un « colonialiste » en le tuant, même si l’on peut admettre provisoirement que la violence désaliène le colonisé. Si elle tue des symboles, elle tue en même temps des hommes, des femmes et des enfants ; et si « l’intention hostile de cette guerre a quelque chose d’abstrait », ses effets meurtriers sont on ne peut plus concrets !

La violence visant le colonisateur est justifiée par sa fonction « démonstrative », ou « provocatrice », son « rôle de dévoilement de la réalité oppressive de l’ordre colonial ». À notre avis, c’est vrai quand la répression dépasse en gravité et en étendue la violence des révoltés. Ce ne l’est plus quand les deux camps rivalisent de violence en s’appliquant la loi du talion, et surtout quand les insurgés provoquent délibérément l’escalade de la répression par une surenchère de leur propre violence. Quand le terrorisme aveugle provoque des représailles aveugles, ceux qui les ont provoquées n’ont pas le droit de les condamner. La férocité de la répression ne prouve pas l’inhumanité du colonialisme, car la preuve est falsifiée par la provocation : le moins colonialiste des peuples, traité comme le furent les Français d’Algérie, ne réagirait pas autrement qu’eux. La création d’une situation irréversible, « point de non retour » du conflit, suffit-elle à justifier ce qu’Albert Camus appelait « l’abominable provocation » [2] du 20 août 1955 ? Slimane Chikh, citant Hegel, affirme la nécessité salvatrice de la violence en dépit des souffrances qu’elle inflige aux innocents, et conteste la possibilité de l’innocence dans un conflit où chacun doit prendre parti, ou chacun « a les mains sales ». Mais peut-on refuser toute limite à la violence légitime sans justifier l’injustifiable, et ouvrir la voie aux « crimes les plus sordides » dont l’auteur reconnaît que l’insurrection n’a pu les éviter ?

Cette violence « externe » est donc censée, suivant les théories de Fanon, « désintoxiquer » le peuple colonisé, et l’unifier en détournant contre l’ennemi étranger l’agressivité accumulée à l’intérieur de la société dominée par l’oppression coloniale. Néanmoins, Slimane Chikh est obligé de réintroduire une « violence interne » dérivée de la violence externe, par le biais du châtiment des traîtres. Les analyses qu’il lui consacre sont d’une grande pertinence. Il reconnaît que cette nécessité du combat risque de « se transformer en principe d’organisation et dicter une conduite où l’autoritarisme prend le pas sur le souci de la persuasion, et la brutalité devenir le seul moyen d’argumentation ». La violence, de moyen, devient une fin, ou plutôt, de moyen ultime elle devient « le moyen unique qui règle tout problème avec autrui ». Cette intoxication par la violence dément les théories de Fanon, mais est confirmée par ses observations cliniques. Cependant, Slimane Chikh le suit encore pour expliquer les excès de la violence interne par « la manifestation de cette agressivité accumulée au cours des longues années de domination coloniale ». D’après lui, ce sont des « bavures » individuelles, contraires aux instructions répétées du FLN, qui révèlent « l’insuffisance de l’effort de politisation » et celle de « l’organisation et de la coordination de l’action ».

Cette interprétation nous paraît insuffisante. Dans une structure autoritaire et hiérarchisée comme l’était le FLN-ALN, il est difficile de croire que les chefs n’auraient pu empêcher les « bavures » s’ils l’avaient voulu. Or l’attitude que mentionne Slimane Chikh à leur propos - les passer officiellement sous silence ou les imputer au pouvoir colonial - n’est guère différente de celle que Pierre Vidal-Naquet a justement reprochée aux responsables français [3]. De plus, il ne semble pas que les colonels de wilayas et les membres de l’exécutif du FLN aient résisté mieux que leurs subordonnés à la tentation de l’autoritarisme absolu [4].

Plutôt que le manque de contrôle des exécutants par l’organisation, le vrai problème nous parait être l’absence de contrôle de l’organisation par le peuple dont elle se réclame.

Quant à la source de la violence interne, la théorie de Fanon nous semble faire la part trop belle à la « dynamique externe ». Entre son explication sociologique de la violence algérienne et l’interprétation biologique, ou raciste, du professeur Porot, il y a place pour une conception historique. Or, l’histoire de l’Algérie ne commence pas en 1830, et la société algérienne précoloniale était déjà caractérisée par un degré élevé de violence interne. En particulier, les rapports des populations algériennes avec le pouvoir central (l’État turc et ses rouages locaux) étaient fondés sur la force au moins autant que sur un consensus religieux face aux Infidèles. On peut donc expliquer l’autoritarisme du FLN autrement que le fait Slimane Chikh, par la résurgence de la conception traditionnelle du pouvoir, comme Mohammed Harbi [5], ou encore par la contagion du modèle totalitaire, confondu avec les « principes révolutionnaires ».

En tout cas, ces excès nuisent à l’union nationale en provoquant des résistances qui multiplient le nombre des « traîtres », et empêchent ou retardent l’identification réelle du « groupuscule » initial des « conjurés » à la nation unanime ; à tel point que le nombre des « traîtres » a pu égaler celui des « patriotes » [6], situation de guerre civile inavouée.

Le bilan critique de Slimane Chikh a le mérite de ne cacher aucune réalité, même les plus déplaisantes pour une « foi naguère bardée de certitudes ». On peut regretter que sur les points évoqués plus haut, il n’ait pas pris davantage de distance avec le projet théorique du FLN, qu’il l’ait trop « pris au mot ». Mais peut-être est-ce trop exiger. Il est déjà très positif qu’un tel livre, qui pose des questions fondamentales pour l’avenir de l’Algérie, soit publié dans ce pays.

3° TÉGUIA (Mohammed) : L’Algérie en guerre. Alger, Office des Publications Universitaires, 786 p.

En même temps, et sous un titre voisin, parait à Alger la thèse de troisième cycle d’histoire de Mohammed Téguia : L’Algérie en guerre (1954-1962) : foyers, bases et conduites de la lutte d’indépendance ; d’une étude régionale à une contribution à l’histoire de l’intérieur, soutenue à Paris VIII en 1976. Celle-ci repose sur une documentation originale provenant de la wilaya IV, où combattit l’auteur, et qu’il reproduit en de précieuses annexes, complétée par une très riche bibliographie. Elle élargit son mémoire de maîtrise consacré à cette wilaya (Paris VIII 1974) en un essai d’histoire de l’ALN intérieure, voire de l’aspect militaire de la révolution algérienne, qui ne peut-être distingué de son aspect politique. C’est pourquoi il évoque, dans une première partie (« le cadre d’ensemble ») les origines et les facteurs du recours à la lutte armée ; dans une deuxième (« le mouvement de libération nationale en œuvre »), le développement de la lutte de 1954 à 1959 ; enfin, dans une troisième partie (« des diverses crises à l’indépendance »), la montée des tensions qui firent éclater le FLN au lendemain de sa victoire.

L’auteur, qui semble avoir interrompu ses études pour rejoindre le maquis, s’exprime sur un ton beaucoup moins nuancé que Slimane Chikh. Ses sympathies et ses antipathies sont clairement perceptibles. C’est ainsi qu’il prononce un réquisitoire contre le messalisme et contre Messali, auquel il ne reconnaît aucun mérite. Au contraire, il plaide pour les communistes algériens, victimes d’un injuste ostracisme de la part du FLN, tout en critiquant sévèrement les infidélités du PCF aux principes marxistes-léninistes. Son analyse de la répression, utilisant d’abondantes sources françaises, laisse transparaître le peu d’estime du maquisard pour ses adversaires qui luttaient à dix contre un, en employant des méthodes cruelles ou déloyales. Mais l’autocritique est, chez lui, plus rare et plus discrète. C’est ainsi qu’il refuse, contrairement à Slimane Chikh de reconnaître la responsabilité du FLN dans le massacre de Melouza, pourtant bien établie [7]. Il explique le nombre des « harkis » engagés du côté français par l’attrait de la solde (ce qui n’est pas inexact) et par des massacres attribués faussement au FLN (ce qui demanderait des preuves). Il condamne cependant l’interdiction du tabac sous peine de mort ou de mutilation (excellent exemple d’abus d’autorité), et, incidemment, les « méthodes révoltantes » utilisées par les enquêteurs lors des purges internes de sa wilaya.

L’apport de ce livre nous semble important sur deux plans, externe et interne. Il réfute d’abord le mythe de la victoire militaire de l’armée française en Algérie ; si l’ALN intérieure fut grandement affaiblie de 1958 à 1960 par le plan Challe, elle ne fut pas anéantie, et renforça nettement son potentiel et son action à partir de 1961, grâce aux harcèlements de l’ALN extérieure sur les barrages, et à l’ouverture d’un « troisième front » dans les villes. L’auteur dénonce la tendance des auteurs français (notamment Philippe Tripier) à minimiser les effectifs « rebelles » en séparant les « auxiliaires » des « réguliers » ; il distingue la réelle pénurie d’armes des disponibilités en combattants aguerris et en volontaires. La disproportion des forces et les purges provoquées par les méthodes machiavéliques de la guerre psychologique ne suffirent pas à briser le moral des combattants. Mohammed Téguia apporte un témoignage capital sur « l’affaire Si Salah » qui fit croire à une capitulation de l’intérieur au printemps 1960. Il montre que l’initiative des négociations avec le gouvernement français fut le fait de quelques hommes (les commandants Lakhdar et Halim), que leurs collègues du Conseil de wilaya, Si Salah et Si Mohammed, ne furent informés qu’après coup, et que la base ne fut pas consultée. Une opposition intérieure, organisée par le lieutenant Lakhdar Bourougâa, réussit à retourner Si Mohammed, le plus réservé des quatre chefs, qui prit le commandement de la wilaya le 29 juin 1960 et la dirigea magistralement jusqu’à sa mort au combat en août 1961. Ainsi, l’échec de cette initiative fut-il indépendant de l’attitude du général de Gaulle et de la rencontre de Melun. Ce témoignage, qui confirme la version déjà recueillie par Yves Courrière [8] et la pertinente analyse de Bernard Tricot [9], devrait mettre un terme aux controverses en prouvant que les chefs militaires français s’étaient leurrés en croyant la victoire à portée de la main.

Sur les crises internes du FLN, Mohammed Téguia présente le point de vue d’un combattant de l’intérieur. Il défend donc le congrès de la Soummam de 1956, et le comité inter-wilayas de 1958. Dans la crise finale qui opposa l’État major général de l’ALN au GPRA de juillet 1961 à l’été de 1962, sa position est plus nuancée. Il se sent solidaire de l’État-Major contre les « politiciens » bourgeois ou embourgeoisés de l’extérieur, mais il rejette comme « aventuriste » sa condamnation des accords d’Évian, à ses yeux modèle de « compromis révolutionnaire ». Il n’en est pas moins méfiant envers les envoyés du GPRA, Azzedine et Omar Oussedik, anciens camarades dont le séparent de vieilles suspicions [10], et qu’il accuse de rentrer avec l’autorisation des Français. La wilaya IV adopte une attitude défavorable à l’EMG, puis au GPRA et à la zone autonome d’Alger, enfin au Bureau Politique, qui la dénonce comme fauteur d’anarchie et la fait réduire par les troupes de l’ANP. Mohammed Téguia défend sa wilaya contre les accusations de « wilayisme » et de démagogie, en la présentant comme une authentique force populaire calomniée par la bourgeoisie et par les hommes de pouvoir, profiteurs de la révolution.

Sa conclusion est néanmoins optimiste. En dépit des insuffisances du mouvement de libération nationale dirigé par la « petite bourgeoisie nationaliste », l’éveil de la conscience populaire suscité par la participation des masses ne permettra pas de ranger la révolution algérienne, révolution immature, parmi les révolutions manquées. Pour lui, comme pour M. Harbi et S. Chikh, l’avenir est à la lutte des classes.

Ces trois grandes synthèses ne doivent pas faire dédaigner les témoignages de qualité : un hasard heureux permet d’en confronter deux, qui apportent des éclairages complémentaires sur les réalités contradictoires de cette guerre.

4° OULD MOUSSA (Belkacem) : Les chemins de l’indépendance. Paris, Sindbad, décembre 1980, 316 p.

Le récit de Belkacem Ould Moussa semble autobiographique. Il vise à montrer, à travers un cas individuel, le processus qui conduisit tant d’Algériens de la prise de conscience anticolonialiste et nationaliste à l’engagement dans la lutte armée sous ses diverses formes, jusqu’à la victoire. L’auteur, né dans une famille modeste de Mostaganem en 1941, décrit sa découverte de l’altérité et de l’iniquité dans ses relations avec la colonie européenne et à l’école française, l’affermissement de sa conscience nationale sous les influences de sa famille, du Cercle des étudiants musulmans, de l’insurrection et de la répression. À 18 ans, en juillet 1960, il abandonne ses études pour commettre un attentat contre les « colonialistes », plonge dans la clandestinité, surmonte, au maquis du Dahra, l’anti-intellectualisme du terrible Si Tarik, puis connaît le baptême du feu. Capturé, il subit la torture sans avouer son secret, déjoue les pièges et les tentatives de séduction. Libéré en juillet 1961, il se réfugie en France et y reprend ses études, jusqu’au jour de l’indépendance. Ce récit se veut exemplaire, et il l’est, par la force du patriotisme et de ses racines religieuses chez le narrateur et presque tous ses compagnons de lutte. Il échappe cependant au manichéisme simpliste grâce à son humanité : l’auteur doit surmonter sa peur et son désir de vivre, il éprouve des scrupules de conscience, il découvre avec effroi les cruelles « purges » de Si Tarik. L’impression positive, voire exaltante, qu’il veut produire n’en est que plus convaincante.

5° FERDI (Saïd) : Un enfant dans la guerre. Paris, le Seuil, 165 p.

Tout autre est le témoignage de Saïd Ferdi, bien qu’il semble commencer de la même façon. Fils d’un fellah pauvre d’un village de l’Aurès, instruit seulement à l’école arabe, l’auteur n’a que dix ans quand éclate l’insurrection, que rejoignent bientôt ses deux frères aînés. Lui-même sert d’agent de liaison quand il est arrêté par les « forces de l’ordre » sur le chemin de l’école, le 3 mars 1958. Torturé, compromis, il devient malgré lui un « traître », et doit quitter l’Algérie en 1962 dans les fourgons de l’armée coloniale. Son témoignage est un terrible réquisitoire contre celle-ci : à l’exception de quelques personnalités vraiment humaines - dont son meilleur ami, tué au combat - les tirailleurs dont il partage la vie sont des mercenaires sans conscience, et leurs cadres français trop souvent des brutes. Mais, il n’est pas moins sévère pour l’excessive rigueur des « fellaghas », qui fait de tout suspect (à tort ou à raison) un traître ou un cadavre. Il montre qu’une partie de ceux que l’on appelle en bloc des « Français musulmans » ou des « harkis » n’ont pas choisi leur camp, mais y ont été entraînés par les circonstances et par les pressions des deux côtés. Bien que l’auteur généralise abusivement son expérience en affirmant que l’armée française combattante était essentiellement composée de musulmans, il démontre avec éclat la réalité d’une guerre civile entre Algériens : déjà frère d’un chahid avant sa capture, il reconnaît le cadavre de son autre frère moudjahid après un combat ; pis encore, un tirailleur tue son propre père dans les rangs des « rebelles ». Confirmation paradoxale de l’opinion de Slimane Chikh, suivant lequel « chaque famille compte parmi ses membres, soit un martyr mort les armes à la main, soit un militant qui a connu la prison, soit un moudjahid revenu auréolé de son combat patriotique ». Ce témoignage sans art ni artifice plaide contre la violence aveuglement déchaînée, comme le Journal de Mouloud Feraoun dont il retrouve les accents tragiques.

La guerre d’Algérie, sous la direction de Henri ALLEG, par Henri Alleg, Jacques de Bonis, Henri J. Douzon, Jean Frère, Pierre Haudiquet. Paris, Temps actuels, 3 tomes, 609 p., et 613 p. (dont annexes).


La monumentale histoire de la guerre d’Algérie publiée par Henri Alleg et son équipe d’auteurs communistes rompt fort heureusement un quasi-monopole de la tendance favorable à l’Algérie française dans les ouvrages de synthèse consacrés à ce sujet. « Par quelle logique aberrante des hommes dont l’histoire a vérifié la clairvoyance devraient-ils être moins aptes que d’autres à tirer les leçons du passé, alors que ceux qui se sont trompés sur l’essentiel seraient, eux, parfaitement qualifiés pour tenter de justifier leurs propres erreurs ? », demande Henri Alleg dans sa préface. On ne peut que l’approuver, tout en observant que la certitude d’avoir eu raison est la chosela mieux partagée dans ce conflit.

Le mérite le moins discutable de cet ouvrage est son remarquable apport documentaire. Les auteurs ne se sont pascontentés de dépouiller et d’utiliser habilement toutes les publications antérieures, même les plus récentes, favorables ou non à leur cause ; ils ont rassemblé un grand nombre de témoignages inédits d’acteurs nationalistes et communistes, algériens et français, une iconographie originale, et des annexes fort utiles (textes du FLN, du PCA et du PCF, notices biographiques, index, etc.). Cet effort mérite d’être salué avec gratitude.

Quant au but de l’entreprise, il est ce qu’on peut attendre de ses auteurs : défense et illustration des positions communistes, du PCA et du PCF, contre les critiques venues de divers bords. L’apologie est pleine d’assurance face aux partisans de l’Algérie française, mais aussi devant les socialistes et les gaullistes, coupables d’avoir inutilement prolongé la guerre : les communistes se donnent le beau rôle, celui du premier parti favorable à l’indépendance de l’Algérie. Elle est plus discrète et plus embarrassée en réponse aux reproches des nationalistes algériens et des « gauchistes » français, qui jugent le PCF trop timoré dans sa lutte pour la paix.

Ces considérations expliquent l’économie générale de l’ouvrage. Le premier tome (« De l’Algérie des origines à l’insurrection » : « Le torrent souterrain » par Henri Alleg ; « Les occasions perdues » par Henri J. Douzon) justifie le nationalisme, et le soutien plus ou moins constant que lui accordèrent le PCA et le PCF. Le deuxième (« Des promesses de paix à la guerre ouverte » : « L’incendie », par Pierre Haudiquet ; « À la recherche du dernier quart d’heure », par Jacques de Bonis) rejette sur la SFIO et sur l’ensemble de la gauche non communiste au pouvoir la responsabilité de la prolongation et de l’aggravation du conflit. Le troisième (« Des complots du 13 mai à l’indépendance » : « Un État vient au monde », par Jean Frère) conteste au général de Gaulle et à sa politique le mérite d’avoir mis fin à la guerre. On remarque avec intérêt que les deux années du « ministère Lacoste » sont plus longuement critiquées que les quatre premières du règne gaullien.

Pour apprécier les réponses et les silences des auteurs, le lecteur fera bien de se remémorer les positions adverses en relisant des études, critiques ou indépendantes, de la politique du PCA et de celle du PCF [11]. Nous croyons utile de souligner ici quelques points qui nous semblent trop peu mis en évidence.

C’est ainsi que dans le premier tome, la présentation très compréhensive du nationalisme algérien et de l’insurrection ne laisse guère soupçonner la profondeur de l’anticommunisme du FLN, ni surtout ses raisons. Le communisme est présenté comme l’allié naturel des nationalisme anticolonialiste ; mais Henri Alleg explique avec embarras l’abandon de la revendication d’indépendance en 1936, la condamnation de l’Étoile Nord Africaine puis du PPA, le mot d’ordre d’union (libre) avec le peuple de France. Il déplore une double sous-estimation : de l’anti-impérialisme par les communistes, et de l’anti-fascisme par les nationalistes, dans la conjoncture troublée de l’avant-guerre. Sur le fond, il justifie la théorie thorézienne de « l’Algérie, nation en formation dans le creuset de vingt races », en invoquant les exemples des États d’Amérique latine et des républiques soviétiques d’Asie centrale. Ajoutons, pour plus de clarté, que « l’anti-impérialisme » communiste est fondé sur des raisons d’opportunité, non de principe : il sert les intérêts de l’URSS en encourageant dans les empires coloniaux des puissances capitalistes les mouvements nationalistes qu’elle combat à l’intérieur de son domaine. « L’erreur » de Maurice Thorez fut de croire que l’alliance franco-soviétique contre l’Allemagne nazie imposait de consolider l’empire français autant que l’ex-empire russe, et par les mêmes méthodes.

La même erreur fut commise en mai 1945, quand le PCA et le PCF dénoncèrent les insurgés de Sétif et de Guelma comme des « provocateurs hitlériens ». Henri Alleg présente une bonne mise au point de l’état des connaissances actuelles sur l’insurrection et la répression. Mais il passe très vite sur l’interprétation qu’en donnèrent les communistes. Cependant, il la suggère indirectement en contestant que le socialiste Deluca et le communiste Denier aient pu être victimes de leurs amis musulmans à Sétif. L’attitude de celui-ci qui, cruellement mutilé, se disait victime d’une vengeance colonialiste, est héroïque, mais peu probante ; n’oublions pas que les communistes et les socialistes n’étaient pas des « amis » pour les nationalistes extrémistes (et que les émeutiers venus de la campagne ne les distinguaient pas nécessairement des autres Européens). On s’étonne plus encore de ne pas voir mentionner la participation de communistes et cégétistes de Guelma à la milice du sous-préfet Achiary, qui leur valut d’être exclus quand le parti se résolut à condamner les excès de la répression. Notons enfin que le rapport du général « progressiste » Tubert ne donne aucun chiffre sur les victimes de celle-ci, mais est très défavorable aux insurgés. Ces réactions pour le moins équivoques des communistes expliquent le ressentiment et la méfiance tenaces des nationalistes à leur égard.

Dans ces conditions, le soutien des communistes à l’insurrection n’allait pas de soi. Certes, le PCA et le PCF, dans leurs déclarations respectives des 2 et 8 novembre 1954, avaient rejeté sur le colonialisme la responsabilité des troubles, réclamé l’arrêt de la répression, la reconnaissance du droit du peuple algérien à la liberté, et l’ouverture de négociations avec les représentants qualifiés de toutes les tendances de l’opinion publique algérienne. Mais le PCF, suivi les 14 novembre 1954 et 13 janvier 1955 par le PCA [12], refusait d’ « approuver le recours à des actes individuels susceptibles de faire le jeu des pires colonialistes, si même ils n’étaient pas fomentés par eux ». Cette position, lointain écho de celle prise en mai 1945, ne pouvait qu’accroître la méfiance du FLN envers les communistes. Pourtant, il est vrai que dès novembre 1954 un groupe de militants de l’Aurès (Guerrouf-Lamrani-Laban) noua des contacts entre le maquis et la direction du PCA, qui promit une aide en argent, médicaments, et l’assistance de ses avocats. Mais la décision de participer à l’insurrection fut prise en juin 1955, après des débats internes dont Henri J. Douzon ne dit rien, pour éviter le départ des militants anticolonialistes les plus résolus, et assurer l’avenir du Parti dans l’Algérie indépendante.

Cette décision impliquait pour le PCA l’acceptation de deux risques : la perte de son statut légal, et celle de son électorat européen. Sa réaction aux événements du 20 août 1955 précipita l’actualisation des deux. H. J. Douzon explique en détail la décision et la préparation de cette offensive générale de la wilaya II. On regrette qu’il accorde beaucoup moins d’attention aux massacres d’Européens qu’aux représailles qui en furent la conséquence. Le lecteur cherchera en vain son jugement sur la participation d’ouvriers musulmans au massacres de leurs camarades français et de leurs familles à la mine d’El Halia [13]. Ce silence devant « l’abominable provocation » lui enlève toute crédibilité quand il accuse Guy Mollet d’avoir capitulé le 6 février 1956 devant une minorité d’ « ultras » non représentative de la masse des Français d’Algérie, et quand il juge « imprévisible » et « irrationnel » leur exode final. De même, on s’étonne de voir Pierre Haudiquet mentionner sans commentaire la menace de représailles sur la population civile européenne en cas d’exécution des patriotes algériens condamnés à mort, formulée par le FLN dans un tract de février 1956 [14] et appliquée les 20, 21 et 22 juin suivants. Ces trois jours de « chasse au faciès » européen dans les rues d’Alger, vraies « ratonnades » à rebours, n’empêchèrent pas le PCA de mettre ses « combattants de la libération », leurs armes et leur laboratoire d’explosif, à la disposition de l’ALN, par son accord du 1er juillet avec le FLN.

Il semble donc que le PCA ait renoncé à défendre sa clientèle européenne, sa conception de la nation algérienne, et l’internationalisme prolétarien, pour sauvegarder son avenir en tant que parti algérien et la participation de ses militants à la révolution algérienne. On peut, certes, exalter comme le font nos auteurs l’étonnante solidarité de ce petit groupe d’hommes de toutes origines unis par la même foi politique, et particulièrement le courage des communistes européens ou juifs, reniés par leur milieu et très mal traités par les forces de répression. Mais cela ne permet pas de prétendre, comme le fit le PCF contre toute évidence, que la nation algérienne au sens thorézien s’était formée, et qu’elle luttait toute entière pour son indépendance. Le FLN, et même le PCA, réfutèrent à juste titre cette contre-vérité.

Le PCF, longtemps guide du PCA, a suivi l’évolution de celui-ci, sans s’aligner entièrement sur ses positions. Il est vrai qu’il fut le premier parti en France à dénoncer la guerre et à reconnaître le droit de l’Algérie à l’indépendance. Mais cette avance dont il se fait gloire semble l’avoir embarrassé à l’époque. H. J. Douzon reconnaît que son parti aspirait à sortir de son isolement au terme de la guerre froide, et ne souhaitait nullement rejoindre le PCA dans l’illégalité. C’est pourquoi il fit campagne pour la « paix en Algérie », proposa à la gauche non-communiste un nouveau Front Populaire, vota l’investiture du gouvernement Guy Mollet, puis les pouvoirs spéciaux qu’il demandait en mars 1956, dans l’espoir d’infléchir sa politique. Il recourut dans la même intention aux manifestations de masse contre le départ des rappelés, diffusa sa propagande dans l’armée et soutint les refus individuels d’obéissance (sans les provoquer), mais s’arrêta au seuil de l’illégalité en refusant l’insoumission, la désertion, et l’aide au FLN.

Nos auteurs tirent argument de cette politique unitaire pour rejeter sur les partis du « Front républicain » toute la responsabilité de la prolongation de la guerre. Le gouvernement de Guy Mollet aurait trahi la volonté de paix exprimée par la majorité des Français le 2 janvier 1956 en refusant le Front populaire pour s’orienter en fait vers une majorité dite « d’union nationale ». Il aurait tenté de faire oublier ses capitulations devant les ultras d’Alger (le 6 février 1956) et devant les militaires (le 22 octobre 1956) en exaltant le chauvinisme (par l’expédition de Suez) et l’anticommunisme (après l’intervention soviétique à Budapest).

Cette thèse doit être fortement nuancée. En fait, les élections du 2 janvier 1956 n’avaient donné aucune majorité nette, et les sondages montraient en février une opinion partagée entre une majorité relative favorable au statu quo en Algérie (49 %), et une minorité de 25 %, pour « des liens moins étroits », les 26 % restants ne se prononçant pas. Même si l’on observe ensuite une inversion du rapport des deux principales tendances (36 % pour l’Algérie française, 40 % pour des liens moins étroits en septembre 1957), et s’il existe une majorité pour des négociations avec le FLN dès juillet 1957, il n’y en a pas encore pour l’indépendance de l’Algérie [15]. Les négociations secrètes entamées par Guy Mollet avaient achoppé avant la capture des négociateurs algériens sur les conditions posées par le FLN au Congrès de la Soummam : indépendance totale, et représentativité exclusive du Front. Leur éventuelle acceptation aurait fait éclater la SFIO, le gouvernement, et sa majorité parlementaire, sans pouvoir en rallier une autre. Or, faute d’une majorité indiscutable, il était impossible d’imposer l’indépendance de l’Algérie aux « colons » et aux chefs militaires sans risquer une guerre civile, comme le prouva la crise de mai 1958.

Pour donner raison à H. J. Douzon, le fait que le PCF était le seul grand parti favorable à l’indépendance aggravait considérablement le risque de guerre civile, en semblant lier la « sécession » de l’Algérie et la « communisation » de la France. La crainte d’être acculé au dilemme : révolution ou dictature, a sans doute pesé sur le comportement de la gauche non-communiste, jusqu’à son ralliement majoritaire à la solution gaullienne. Mais le PCF serait beaucoup mieux placé pour le lui reprocher, s’il avait prouvé l’universalité de son anti-impérialisme en condamnant l’intervention soviétique en Hongrie aussi énergiquement que la guerre d’Algérie et l’expédition de Suez. En s’y refusant - et sur ce point aucune auto-critique n’est en vue - il a lui-même porté un coup très rude à la cause de la paix en Algérie.

Le dernier tome suscite moins de contestations. De mai 1958 à juillet 1962, le PCF sort de son isolement grâce à la lutte antifasciste. Il est rejoint dans son opposition au coup d’État du 13 mai par quelques personnalités de gauche (Mitterrand, Mendès-France), et par une minorité dissidente de la SFIO, qui va fonder le PSU. Mais ce qui reste du parti de Guy Mollet, et d’autres hommes de gauche, préfèrent confier à de Gaulle le soin de trouver une solution en Algérie. Le PC combat cette confiance, largement répandue, en le dénonçant comme l’homme des factieux d’Alger (erreur corrigée après l’autodétermination et les barricades), et comme celui du grand capital, dont sa politique néo-colonialiste sert les intérêts [16]. Il s’efforce donc de faire pression sur celui-ci pour le pousser à négocier avec le GPRA, en mobilisant les masses, d’accord avec les autres partis de gauche et les syndicats, tout en refusant d’approuver les appels à l’insoumission et au soutien direct du FLN [17]. Mais cette politique est relativement décevante, puisque le général obtient un nouveau chèque en blanc des 3/4 des votants au référendum du 8 janvier 1961, avec le concours de la SFIO. Plus efficace est la mobilisation antifasciste contre les coups de force d’Alger et contre l’OAS, dont la haine anticommuniste a sans doute favorisé la remontée du PC en 1962.

En somme, les auteurs ont réussi à prouver que leur parti fut en France, de 1954 à 1962, le premier et le plus constant avocat de l’indépendance de l’Algérie. Leur démonstration ne semble pas entachée d’un grand nombre d’inexactitudes [18]. L’épilogue en contient pourtant une, particulièrement grave : l’affirmation qu’un million d’Algériens ont été tués par les Français (alors qu’aucune estimation n’est fournie du nombre de victimes civiles imputables à l’ALN).

Cette affirmation de pure propagande, donnée sans aucune justification, comme un article de foi au-dessus de toute discussion, n’est ni vraie ni vraisemblable [19]. Un tel procédé jette un doute sur la valeur historique de l’ensemble de l’ouvrage. Il montre les limites de l’esprit critique des auteurs, qui n’ont pas voulu ou pas su se poser toutes les questions. D’une réalité complexe et contradictoire, ils n’ont retenu que ce qui pouvait conforter leurs convictions [20]. Marx disait que « l’humanité ne se pose que les problèmes qu’elle peut résoudre ». C’est aussi vrai d’un parti qui croit détenir, avec le « socialisme scientifique » la clé du « sens de l’Histoire ».

7° FRÉDEFON (Luc) : Le grand guignol, ou la vie quotidienne d’un appelé en Algérie. Mérignac, Eddibor, 222 p.

Le témoignage de Luc Frédefon ne se réclame d’aucune doctrine. Le service militaire accompli en Algérie de 1958 à 1960 a fait de ce jeune appelé, poète de vocation, un journaliste à Témoignage Chrétien. Pour épancher sa bile, il a choisi le ton de la dérision dans ce récit d’abord conté, puis rédigé une première fois en 1964, qui contient des extraits de journal intime, de lettres, et de roman, inspirés par la même expérience. L’action se passe en majeure partie à Aflou, dans le djebel Amour, ce qui permet de recouper le témoignage de Pierre Boudot, L’Algérie mal enchaînée (Gallimard 1961). Sa version est résolument antimilitariste : les militaires de carrière y sont ridicules ou plus souvent inquiétants, tels que le colonel Roumiantzoff, l’officier de renseignement « Martini », et son égorgeur dont l’auteur fait la connaissance en prison (où l’a conduit son refus d’une discipline abusive). Les personnages sympathiques sont les camarades du régiment, et les Algériens que Luc Frédefon apprend à connaître et à aimer dans ses fonctions d’instituteur improvisé, sans trop d’ennuis avec le FLN. Son interprétation de la guerre rejoint donc celle de Jean-Pierre Vittori et de la FNACA.

8° POUGET (Jean) : Bataillon RAS Algérie. Paris, Presses de la Cité, 382 pages.

Le témoignage du commandant Jean Pouget, officier de carrière, semble à première vue contredire le précédent, mais à la lecture, il se révèle plutôt complémentaire. Le récit commence d’une manière exemplaire, comme celui d’Erwan Bergot [21], mais il continue d’une façon de moins en moins conventionnelle. C’est que son auteur n’est pas un officier ordinaire : saint-cyrien de 1940, maquisard en Corrèze de 1942 à 1944, puis chef d’unité de contre-guérilla en Indochine, officier d’ordonnance du général Navarre parachuté volontairement sur Dien Bien Phu, ce « baroudeur » est aussi un esprit non conformiste (« anarchiste » pour ses supérieurs). Pressentant que l’armée est engagée en Algérie dans une nouvelle guerre sans issue, il veut démissionner, mais doit s’y reprendre à trois fois.

La première fois, il se voit proposer la mission désespérée de reprendre en main le 228e bataillon d’infanterie, horde de rappelés en mutinerie permanente parquée à Bordj de l’Agha, à la lisière du Sahara. Sa réussite, contée par Yves Courrière dans Le temps des léopards, a été utilisée dans leurs films par René Vauthier (Avoir 20 ans dans les Aurés) et par Yves Boisset (RAS). Le jeune commandant transforme ses mutins débraillés en soldats qui font la guerre avec succès. Bientôt les premiers morts du bataillon lui font ressentir plus vivement le besoin de croire en l’utilité de leur sacrifice. Mais il est troublé par ses contacts avec certains ralliés ou prisonniers (notamment le chef MNA Abderrahmane Bel Addis), et par un séjour en métropole. Confronté dès son retour au terrorisme de l’implacable Si Haoues, nouveau colonel de la wilaya VI, se voyant sur le point d’être entraîné dans l’engrenage de la torture, il démissionne une deuxième fois.

Mais, dans l’espoir de mettre fin au « système » incapable de trouver une solution au problème algérien, il se laisse recruter par le gaulliste Delbecque à l’antenne algéroise du ministère de la Défense Nationale. Dans cette officine chargée de canaliser les complots du 13 mai au profit du général de Gaulle [22], Jean Pouget mène une politique personnelle très libérale. Il veut faire entrer Jacques Chevallier et Ferhat Abhas au Comité de Salut Public, reçoit un émissaire de la wilaya IV [23], espère une réconciliation générale dans l’euphorie de la fraternisation [24], et fait scandale en se laissant séduire par une jeune militante du FLN en liberté surveillée. Abandonné par ses protecteurs gaullistes, il est limogé et assigné à résidence par le général Salan. Il réussit enfin à quitter l’Algérie et l’armée pour se lancer dans une nouvelle carrière de journaliste et d’écrivain.

Ce récit au ton très personnel combine les qualités de sincérité du témoin et d’objectivité du chercheur qui travaille sur archives. Seul artifice romanesque, le dédoublement de la personnalité de l’auteur entre le commandant Jean Marie et son « interviewer » Jean Pouget, ne trompera personne, grâce aux pièces justificatives publiées en annexe.

9° DELARUE (Jacques) : L’OAS contre de Gaulle. Paris, Fayard, 312 p.

Le récit de Jacques Delarue n’est pas celui d’un partisan, mais d’un policier républicain qui a fait, en conscience, son devoir. Historien à ses heures, il n’a pas voulu laisser sans réponse les souvenirs publiés par bon nombre de ses anciens « clients », et présente « un témoignage serein de l’expérience vécue de l’autre côté de la barricade, celui du respect de la loi et de la fidélité à la République » [25]. L’auteur raconte, en des épisodes dignes du meilleur roman policier, une longue lutte pour déjouer les entreprises inlassablement répétées d’une minorité résolue à imposer sa dictature à la masse des Français, depuis les premiers complots de 1956 (affaires de la « Villa des Sources » et du bazooka) jusqu’à l’arrestation en 1965 du dernier irréductible de l’OAS, Gilles Buscia. Lutte qui eut pour principal enjeu, de 1961 à 1965, la protection du général de Gaulle et de son premier ministre contre de nombreuses tentatives d’assassinat. Elle fut entravée par les multiples complicités, actives ou passives, dont bénéficia l’OAS dans les rangs de l’armée, des services secrets, de la police, et même jusqu’à l’Élysée. Mais ce livre révèle aussi, outre les divisions bien connues des activistes, l’extraordinaire efficacité d’un traître infiltré dans leurs rangs, que l’auteur désigne sous ses pseudonymes « Benoît » et « Pastis ». Jacques Delarue retrace son action sans aucune haine pour « les hommes égarés que nous nous efforcions de ramener dans la légalité » [... ] « dangereux et pitoyables à la fois ». On regrette seulement qu’il laisse dans l’ombre la face gaulliste des complots contre la IVe République, et que son livre n’aborde pas le rôle de la direction centrale de la police judiciaire dans la lutte contre le FLN et le MNA, ce qui est une autre histoire.

10° BUSCIA (Gilles) : Au nom de l’OAS. t1 : Objectif Pompidou ; t2 : Requiem pour une cause perdue. Nice, Alain Lefeuvre, 1980, 242 p., et 1981, 334 p.

Par une heureuse coïncidence, le dernier et le plus redoutable des « clients » de Jacques Delarue (qui évoque avec une sorte de respect sa « très forte personnalité ») publie simultanément sa version des mêmes faits : dans un premier volume, ses tentatives d’assassinat contre Georges Pompidou ; puis, dans un deuxième, l’ensemble de son activité, depuis sa participation au « coup d’Ajaccio » en mai 1958, jusqu’à sa deuxième arrestation en 1965, après l’échec de son attentat contre le général de Gaulle au Mont Faron, et avant d’avoir pu mettre à exécution celui qu’il préparait en Vendée. Le moins que l’on puisse dire est que Gilles Buscia n’a pas usurpé sa réputation. On est effrayé par son caractère volontaire et implacable, violent et vindicatif, par son aptitude à éliminer sans scrupules tous ceux qu’il rencontre en travers de son chemin, qu’il s’agisse de « traîtres » condamnés par ses chefs (comme le commandant Kubaziak) ou de ceux qu’il croit découvrir dans son propre camp (comme ses supérieurs Curutchet et Sergent). Chez lui, ce caractère d’acier semble naturel, préexistant à un engagement pour l’Algérie française qui parait plus un prétexte qu’une cause. L’auteur, né à Bizerte en 1938, est en effet, dès 1956, militant de « Jeune Nation » à Ajaccio. Il n’explique pas l’origine des idées nazies qu’il professe presque ouvertement [26], bien qu’un de ses oncles, arrêté très « correctement » à Toulon en 1943, soit mort en déportation. Un tel homme a de quoi épouvanter même ses compagnons de lutte. Mais il ne semble pas faire peur au colonel Argoud, préfacier de son premier volume [27] .

11° TALBOTT (John) : The war without a name - France in Algeria, 1954-1962. New-York, Alfred A. Knopf 1980, London, Faber and Faber, 1981, 306 p.

Signalons enfin une nouvelle étude due à un auteur étranger au conflit, l’Américain John Talbott, professeur à l’Université de Santa Barbara (Californie). Comme bon nombre d’autres anglo-saxons avant lui, il projette sur ces événements un regard impartial sans être insensible. Son récit, sobre et bien mené, s’attache aux divisions que la guerre a provoquées dans la nation française. Il fait comprendre les raisons de toutes les prises de position, tout en dépassant les points de vue souvent limités de leurs auteurs. On espère donc qu’il sera traduit, comme l’ouvrage d’Alistair Horne en 1980, ou plutôt mieux que lui [28] pour aider les lecteurs francophones à s’évader des idées toutes faites, répétées depuis bientôt vingt ans.

Guy Pervillé

[1] Rubrique réalisée par Guy PERVILLÉ.

[2] Cf. Essais d’Albert Camus, Bibliothèque de la Pléiade, pp. 963-999.

[3] Cf. notamment La raison d’État, Éditions de Minuit 1962.

[4] Cf. le tract d’Abane contre les élections législatives du 2 janvier 1956, reproduit par Mouloud Feraoun, Journal 1955-1962, pp. 50-51, et commenté par Ferhat Abbas, Autopsie d’une guerre, Garnier 1980, p. 151.

[5] Cf. M. Harbi, Le FLN, mirage et réalité. Son interprétation est confirmée, à la base, par le Journal de Mouloud Feraoun, et au sommet, par les Mémoires d’Abbas, qui cite les jugements d’Abane et du colonel Lotfi sur leurs collègues.

[6] Cf. le tract cité d’Abane : « Chaque patriote se fera un devoir d’abattre son traître » (souligné par nous).

[7] Le rapport interne de la wilaya III sur cette affaire, saisi dans les bagages du colonel Amirouche en 1959, a été cité par Claude Paillat dans ses Dossiers secrets de l’Algérie dès 1961. Le récit d’Yves Courrière, (L’heure des colonels), pp. 57-62, repose en partie sur des témoignages d’anciens de la wilaya III, comme nous avons pu le vérifier. Slimane Chikh a le mérite de reconnaître les faits.

[8] Cf. Les feux du désespoir, p. 105-106.

[9] Cf. Les sentiers de la paix, pp. 177-178.

[10] Cf. La version d’Azzedine dans Et Alger ne brûla pas, Stock 1980 et dans On nous appelait fellaghas, Stock 1976.

[11] Cf. par exemple Emmanuel Sivan : Communisme et nationalisme en Algérie, Presses de la FNSP 1976 et Jacob Moneta : Le PCF et la question coloniale, Maspéro.

[12] Déclarations citées par Sivan, op. cit., p. 229, mais non par H. J. Douzon.

[13] « Sur 34 tués, on en comptait dix de moins de quinze ans, dont une fillette de quatre ans, un garçon de trois ans et un bébé de neuf mois » (Claude Martin, Histoire de l’Algérie française, réédition Robert Laffont 1979, t. 2, p. 145).

[14] Tract reproduit en annexe, t. 3, p. 531.

[15] Cf. Charles-Robert Ageron, « L’opinion française devant la guerre d’Algérie », Revue française d’Histoire d’Outre-Mer, n° 231, 2e trimestre 1977.

[16] Cette interprétation - qui rejoint curieusement celle des intégrationnistes - mérite d’être vérifiée par des recherches approfondies.

[17] Sur ce point, le PCF maintient sa position face aux reproches des « porteurs de valise ».

[18] Citons pourtant les 3.024 disparus dans les trois premiers mois de la bataille d’Alger (erreur due à Yves Courrtère), le refus d’admettre la responsabilité de l’ALN dans le massacre de Melouza (cf. M. Téguia), et l’attribution arbitraire à l’OAS de la fusillade d’Oran qui servit de prétexte à un massacre d’Européens le 5 juillet 1962 (sur cette affaire, cf. Pierre Laffont, L’expiation, Plon 1968, et Gérard Israël : Le dernier jour de l’Algérie française, Robert Laffont 1972).

[19] Nous renvoyons encore une fois au commentaire du recensement algérien de 1966 par André Prenant, dans le Bulletin de l’Association des Géographes français, n° 357-358, nov. -déc. 1967. Celui-ci nous a confirmé que la différence entre son résultat et le chiffre prévisible par extrapolation du taux de croissance antérieur au 1er novembre 1954 était d’environ 500.000 (correspondant à l’excédent de décès et au déficit de naissances dus à la guerre, et au départ de 140.000 musulmans réfugiés en France).

[20] Typique est l’exploitation unilatérale qui est faite du Journal de Mouloud Feraoun. De même, les analyses d’Albert Camus sur le terrorisme et ses effets ne sont pas citées.

[21] Bergot (Erwan), La guerre des appelés en Algérie, Presses de la Cité 1980.

[22] Cf. Yves Courrière, L’heure des colonels, pp. 282 sq.

[23] Cf. Paul Marie de La Gorce, De Gaulle entre deux mondes, Fayard 1964 ; Courrière, op. cit., pp. 354, 356, et les indications de M. Téguia sur la position d’Omar Oussedik en mai 1958.

[24] Mais l’auteur se trompe en affirmant que les opérations avaient cessé pendant quinze jours sur tout le territoire. D’après les bilans opérationnels français, l’ALN aurait perdu 3.803 tués en avril 1958 et 3.308 en mai ; les forces de l’ordre, respectivement 342 et 364 (dont le colonel Jeanpierre).

[25] Déjà trois policiers avaient publié une Histoire de l’OAS, sous les pseudonymes de Morland, Barangé et Martinez (Julliard, 1964).

[26] Il justifie « l’exécution » de Georges Pompidou par ses liens avec la banque Rottschild, qu’il identifie à Shylock ; il affirme que les camps de concentration nazis n’avaient rien d’original par rapport à ceux des Britanniques en Afrique du Sud et à ceux de Staline, que le procès de Nuremberg est une imposture, et le 8 mai 1945 l’une de ces défaites que les Français ont la manie de célébrer comme des victoires (introduction du t. 2) ; il ironise sur les fours crématoires (p. 114), et avoue son mépris du christianisme et du judaïsme (p. 253).

[27] P S : Beaucoup plus tard, Gilles Buscia m’a affirmé avoir combattu pour l’intégration de l’Algérie dans la France, et avoir adopté un ton provoquant dans ses Mémoires par réaction contre l’indulgence avec laquelle étaient accueillis des livres à la gloire des Français complices du FLN. J’en prends acte, mais je ne peux effacer ma première impression.

[28] Il est indispensable de corriger une confusion qui rend incompréhensible le bilan des victimes algériennes (141.000 musulmans tués « par leurs compatriotes révolutionnaires » au lieu de : tués par les « forces de l’ordre », p. 246).



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