A propos d’un événement occulté : le massacre du 5 juillet 1962 à Oran (2015)

vendredi 24 avril 2015.
 
Cet article a été publié dans le n° 28 de la revue Ultramarines, revue de l’Association des amis des archives d’Outre-mer à Aix-en-Provence (pp. 78-87). Excellente revue, qui reparaît après une longue interruption ( le précédent numéro est paru en novembre 2009) et qui mérite d’être connue. Voir sur le site internet de l’AMAROM, 29 chemin du moulin de Testas, 13090 Aix-en-Provence, http://revue-ultramarines.fr/ Prix du numéro : 19 euros.

Que s’est-il passé à Oran le 5 juillet 1962 ? A l’exception de ceux qui y vivaient à cette date, et de ceux qui se sentent proches d’eux pour diverses raisons, très peu de Français seraient capables de répondre à une telle question. Il s’agit pourtant du plus grand massacre de civils jamais constaté durant toute la guerre d’Algérie, en un lieu limité et dans un temps limité. Mais il reste beaucoup moins connu des Français que ceux du 8 mai 1945 et du 20 août 1955 dans le Constantinois, ou encore que ceux du 17 octobre 1961 et du 8 février 1962 (métro Charonne) à Paris, et du 26 mars 1962 à Alger (rue d’Isly). En effet, le bilan des victimes européennes (morts et disparus) à Oran le 5 juillet 1962 atteindrait au moins 671 personnes selon le rapport officiel établi en 1963 par Jean-Marie Huille à la demande du secrétaire d’Etat aux rapatriés Jean de Broglie, ou 679 selon l’enquête sur les disparus européens de la guerre d’Algérie effectuée par l’historien Jean-Jacques Jordi [1] grâce à de très larges dérogations accordées par le Premier ministre François Fillon, et publiée en 2011. Aucun autre massacre connu n’approche de cet ordre de grandeur, mais celui-ci reste de très loin le moins connu de tous : parce qu’il est survenu deux jours après la reconnaissance officielle de l’indépendance de l’Algérie, censée signifier la fin d’une guerre déjà trop longue, mais aussi parce qu’il fut délibérément occulté par le gouvernement du général de Gaulle.

Pourquoi donc me suis-je intéressé à un tel sujet ? Parce que depuis 2012 j’avais constaté un regain d’intérêt pour cet événement à l’occasion de son cinquantième anniversaire, et une tendance à la multiplication des polémiques parmi ceux qui s’exaspéraient de le voir encore si peu connu. Exaspération qui inspira à quelques-uns l’idée de lancer une pétition internationale pour la reconnaissance de ce « crime contre l’humanité » [2]. Confronté à cette initiative et sollicité de lui donner mon appui, j’ai préféré différer ma réponse pour prendre le temps de relire attentivement tous les livres que je connaissais en tant que spécialiste de la guerre d’Algérie, et qui en avaient parlé plus ou moins abondamment et précisément. Ce travail me prit quatre mois, et quand il fut terminé mes premiers lecteurs me dirent que j’avais écrit un livre et qu’il fallait le publier [3].

Il ne s’agit certainement pas du seul livre consacré à ce sujet ni même du premier, puisque le journaliste Guillaume Zeller en a tiré en 2012 un récit bien venu [4], mais d’un essai historiographique, c’est-à-dire d’une histoire de l’histoire du massacre d’Oran. En relisant dans l’ordre chronologique de publication tous les ouvrages qui en avaient parlé, j’ai pu réaliser intuitivement un bilan critique de ce que chacun d’entre eux avait pu apporter de faits et d’hypothèses, pour arriver dans ma conclusion à me prononcer sur le degré de crédibilité des principales explications soutenues.

Le fait le plus troublant, c’est qu’un tel événement ait pu être passé sous silence par plusieurs ouvrages importants consacrés à la guerre d’Algérie dans les dix années qui l’ont suivie, parce que leurs auteurs avaient choisi d’arrêter leur récit à la date officielle de la fin de la souveraineté française sur le pays, le 3 juillet 1962. L’exemple le plus frappant est celui du grand journaliste Yves Courrière, dont le quatrième et dernier volume sur la guerre d’Algérie [5] publié en 1971 arrêtait son récit le 3 juillet ; un an plus tard, un cinquième volume illustré reprit les images et le texte d’un film de montage réalisé par le même auteur avec le cinéaste Philippe Monnier. Le film s’arrêtait encore à la même date, mais des rapatriés d’Oran ont pu constater que des images placées quelques minutes avant la fin du film, et censées représenter des combats entre les Algériens et l’OAS, montraient en réalité des civils français d’Oran, les bras levés, raflés par des hommes armés et emmenés vers une destination inconnue le 5 juillet 1962 [6]. Ainsi, le massacre d’Oran fut d’abord, et durant une dizaine d’années, un événement oublié et escamoté.

Et pourtant, ce massacre d’Oran avait été, dès les jours suivant le 5 juillet 1962, mentionné dans la presse, et des livres qui en parlaient avaient commencé à paraître deux ans plus tard. Citons le premier en date, le Journal d’un prêtre en Algérie (Oran 1961-1962), publié au printemps 1964 par le père Michel de Laparre [7]. D’autres parurent encore, plus nombreux et plus importants qu’on pourrait le supposer a priori, dans les trente années suivant l’événement. On y trouve des témoignages, ainsi que des récits fondés sur des entretiens avec des témoins - comme celui de Gérard Israël, Le dernier jour de l’Algérie française [8], paru en 1972 - , mais surtout deux thèses d’histoire inédites, et une grande enquête collective.

La première de ces thèses, intitulée L’OAS en Oranie, fut réalisée sous la direction de Jean-Louis Miège et soutenue à Aix-en-Provence, en 1975, par Régine Goutalier, qui en avait conçu le projet durant un long séjour à Oran de 1964 à 1966. Celle-ci, malgré son peu de sympathie pour l’OAS d’Oran, s’efforça de la comprendre, et accorda une très grande attention à l’émeute particulièrement sanglante qui frappa la population française de la ville une semaine seulement après la fin de son combat contre le FLN et contre le gouvernement français. Puis cinq ans après, en 1980, une autre thèse fut soutenue à l’Université de Montpellier sous la direction d’André Martel par un Algérien, Karim Rouina, sous le titre Essai d’étude comparative de la guerre d’indépendance de l’Algérie de 1954 à 1962 à travers deux villes, Oran et Sidi-Bel-Abbés. Son auteur consacra au 5 juillet d’Oran une attention tout aussi importante, et réalisa une très riche enquête orale auprès des acteurs et témoins algériens. Enfin en 1985, la directrice de la revue L’Echo de l’Oranie, Geneviève de Ternant, publia les premiers résultats d’une grande enquête auprès des témoins oranais, avec l’aide de l’historien Claude Martin, sous le titre L’agonie d’Oran [9]. Deux autres éditions enrichies par de nouveaux témoignages parurent encore en 1991 et en 1996.

Trente ans après l’événement, la bibliographie disponible était donc déjà substantielle. C’est alors que le début de l’ouverture des archives publiques (1er juillet 1992) fit entrer son historiographie dans une nouvelle étape, marquée par l’intervention publique des historiens. Intervention qui se fit d’une manière particulièrement tumultueuse, puisque le grand historien Charles-Robert Ageron, partisan déclaré d’une histoire impartiale de la guerre d’Algérie, crut pouvoir apporter aux Mémoires du controversé général Katz [10] (qui avait commandé les forces de l’ordre à Oran de février à juillet 1962), publiés en 1993, l’appui d’une préface qui confondait le point de vue historique et le point de vue politique ; mais il fut très fermement contredit par le maître de conférences en sciences politiques et journaliste Alain-Gérard Slama. Ce débat agité fut arbitré par l’intervention de l’archiviste du département d’Oran Fouad Soufi, qui critiqua le point de vue partisan d’Alain-Gérard Slama sans vraiment défendre la préface de Charles-Robert Ageron, mais qui apporta des éléments nouveaux. Une plainte pour « complicité de crime contre l’humanité » déposée en 1999 contre le général Katz fut interrompue par la mort du général en 2001.

Cependant, à partir de l’an 2000, des travaux importants d’historiens avaient commencé à renouveler profondément nos connaissances, tels que la thèse de Jean Monneret sur La phase finale de la guerre d’Algérie [11], le livre du général Maurice Faivre sur Les archives inédites de la politique algérienne [12], la thèse d’Eric Kocher Marboeuf sur Jean-Marcel Jeanneney, premier ambassadeur de France en Algérie [13], et plus récemment un nouveau livre de Jean Monneret sur La tragédie dissimulée, Oran 5 juillet 1962 (2006) [14], puis l’enquête de Jean-Jacques Jordi sur les disparus déjà citée plus haut, Un silence d’Etat, les disparus civils européens de la guerre d’Algérie (2011).

Toutes ces lectures m’ont permis de formuler des conclusions sur le degré de crédibilité des différentes explications adoptées par tel ou tel de ces auteurs, et de les passer en revue dans ma conclusion.

La première de ces explications est celle du général Katz, qui a persisté à rejeter la responsabilité initiale de la chasse aux Européens sur un ou des provocateurs irresponsables appartenant à l’OAS, qui n’auraient pas supporté de voir les quartiers européens envahis par le FLN. Mais cette thèse n’est guère crédible parce qu’elle n’a pas reçu la moindre preuve nouvelle depuis plus d’un demi-siècle, et parce que l’OAS avait arrêté son combat depuis le 28 juin, une semaine plus tôt.

Cependant, je lui ai donné en partie raison en admettant que le harcèlement des quartiers musulmans d’Oran par l’OAS dans les quatre mois précédents, qui aurait fait d’après les archives 859 victimes algériennes durant le 1er semestre 1962, était la cause directe la plus vraisemblable du massacre du 5 juillet. Ce qui ne voulait pas dire que ce harcèlement n’était pas une réponse à un terrorisme pratiqué systématiquement par le FLN contre la population civile européenne au moins depuis le début de 1961.

La deuxième explication est celle donnée par le chef de la Zone autonome d’Oran, le capitaine Bakhti. Bien loin d’accuser l’OAS d’avoir déclenché la fusillade et la chasse aux Européens qui en était résultée, il accusait des « bandits » algériens, commandés par un certain Attou, contre lesquels il était intervenu avec les troupes envoyées en renfort par l’ALN du Maroc. Cette thèse est importante parce qu’elle réfute celle du général Katz, mais elle cache le fait capital que la « bande » d’Attou était en réalité une partie importante de l’organisation ALN d’Oran qui avait refusé d’obéir à ses ordres.

La troisième explication, invoquée par le journaliste Etienne Mallarde puis par l’Oranais Jean-François Paya, affirme que la véritable cause du déclenchement de la violence à Oran le 5 juillet serait une intervention occulte des agents du colonel Boumedienne, visant à saboter la célébration de la fête nationale du 5 juillet, annoncée la veille par la radio d’Alger sur l’ordre du GPRA. En effet le colonel Boumedienne, chef de l’Etat-major général de l’ALN destitué depuis peu par le président du GPRA Ben Khedda, soutenait Ben Bella contre le dit GPRA. Boumedienne serait donc l’auteur d’une provocation machiavélique visant à discréditer le GPRA en rétablissant l’ordre à Oran après l’avoir troublés. Cette thèse repose sur des témoignages d’Algériens recueillis à Oran en 1962 ou 1963, que Jean-François Paya estime ne pas avoir le droit de divulguer. Mais les seuls documents qu’il publie ne prouvent pas la validité de ce qu’il affirme.

De plus, il met en cause la responsabilité du général de Gaulle, qui aurait ordonné au général Katz de ne pas intervenir parce qu’il aurait voulu laisser le colonel Boumedienne rétablir l’ordre à Oran, afin de favoriser Ben Bella contre le GPRA. Mais cette thèse est clairement démentie par les instructions du Comité des affaires algériennes publiées par le général Faivre, qui ordonnent au nouvel ambassadeur de France de rester rigoureusement neutre entre les factions algériennes pour ne pas risquer de recommencer la guerre. De plus, Jean-Jacques Jordi a démontré que le 14 juin, le ministre français des affaires algériennes Louis Joxe avait obtenu de son interlocuteur algérien Saad Dahlab l’accord du GPRA pour ne pas faire du 5 juillet la date de célébration de l’indépendance de l’Algérie. Ainsi ce jour-là il n’y avait plus aucun représentant officiel de la France en Algérie, puisque le Haut-Commissaire de France Christian Fouchet avait quitté l’Algérie le 4, et que le premier ambassadeur de France Jean-Marcel Jeanneney ne devait rejoindre son poste que le 6, l’un et l’autre devant participer le 5 à une importante réunion du Comité des affaires algériennes, qui avait eu lieu en début d’après midi. L’addition de tous ces faits détruit la crédibilité de l’explication invoquée par Jean-François Paya.

Ces conclusions m’ont attiré des réactions épidermiques d’une étonnante véhémence, mais tous les comptes rendus de mon livre qui ont paru ont été très élogieux. Cependant, j’ai reçu par un mail d’un lecteur oranais une critique valable : l’absence du point de vue de l’OAS d’Oran, exprimé en 2002 par les Mémoires de l’un de ses principaux responsables Claude Micheletti : Fors l’honneur, la guérilla OAS à Oran en 1961-1962 [15].

J’avais moi-même ressenti l’inconvénient de citer longuement les Mémoires du général Katz, sans pouvoir les confronter systématiquement à une source aussi riche mais d’un point de vue opposé. Puis, je me suis souvenu que j’avais négligé de relire deux ouvrages importants dont j’avais eu connaissance depuis quelques années. La première était le livre d’Olivier Dard, Voyage au cœur de l’OAS [16], écrit principalement à partir des archives de l’OAS d’Alger communiquées à l’auteur par Jean-Jacques Susini ; comme d’autres livres que j’avais lus auparavant, il démontrait clairement que la stratégie consistant à provoquer une rupture du cessez-le-feu en harcelant les musulmans dans les quartiers européens d’Alger, afin d’obliger l’armée française à les défendre contre les réactions du FLN, était bien attestée à partir du 23 février 1962, mais qu’elle n’avait jamais été approuvée par tous les chefs de l’OAS. Il donnait assez peu d’informations sur l’OAS d’Oran, mais il soulignait qu’il n’était pas possible de la considérer comme une copie conforme de celle d’Alger.

D’autre part, j’avais eu communication d’un exemplaire des « Messages, directives et commentaires » de l’OAS d’Oran qui m’avait été confié par celui qui l’un de ses responsables, Guy Pujante. Je l’avais rapidement parcouru avant de l’oublier dans un coin de mon bureau. Cette source originale, complétée par les Mémoires de Claude Micheletti, aurait pu me fournir le moyen d’équilibrer comme je le souhaitais ceux du général Katz.

Le recueil des tracts et des émissions de l’OAS d’Oran atteste clairement que celle-ci n’a jamais négligé la population musulmane parmi les destinataires de sa propagande, et qu’elle n’a jamais accepté de la confondre avec le FLN, même si le nombre des militants musulmans acquis à sa propre cause a toujours été faible. De février à mai 1962, de nombreuses émissions mentionnent des actions offensives contre le FLN, tout en niant que la population musulmane fût visée en tant que telle. Pourtant, trois documents prouvent les difficultés que l’OAS a rencontrées pour combattre le FLN sans frapper nécessairement la population musulmane. Le 3 mars 1962, l’odieux assassinats de Madame Ortega et de ses deux jeunes enfants à Mers-el-Kébir provoqua d’abord des vengeances assumées par l’OAS et une séparation des populations européenne et musulmane, puis dans un deuxième temps de spectaculaires manifestations de réconciliation des deux populations sous le drapeau tricolore à l’occasion des obsèques des victimes le 7 mars. Puis le 22 mars, trois jours après le cessez-le-feu décidé à Evian, l’OAS ordonna aux gendarmes mobiles d’évacuer la ville européenne et de se regrouper sur la ligne de démarcation qui séparait les quartiers européens des quartiers musulmans d’Oran, puisque ces derniers étaient abandonnés au FLN. Enfin, le 14 mai, l’Organisation expliqua pourquoi elle s’était abstenue la veille de toute action contre les quartiers musulmans, en souvenir de la fraternité retrouvée le 13 mai 1958 : « Nous ne faisons pas la guerre aux musulmans, pas plus que les Américains et les Anglais ne faisaient de 1942 à 1945 la guerre aux Français parce qu’ils bombardaient leurs villes et faisaient de nombreuses victimes dans la population civile. La guerre était faite aux Allemands qui occupaient la France et à ceux des Français qui les aidaient. Nous faisons, nous, la guerre au FLN qui occupe la ville musulmane, et à ceux des Français qui collaborent avec lui. Pour des raisons de sécurité, il y a en outre dans Oran une « ligne de démarcation » qu’il nous faut faire respecter par les musulmans tant que les ennemis ne seront pas vaincus. Mais ils le seront bientôt. LA FRATERNITE ET L’UNION DES COMMUNAUTES SERONT ALORS RETROUVEES » [17].

Les Mémoires de Claude Micheletti (le fils du principal chef civil de l’OAS d’Oran, Charles Micheletti), confirment et précisent ces informations, tout en niant très fermement que cette OAS ait jamais voulu pratiquer une stratégie de provocation aux dépens des musulmans, et ils sont cohérents en invoquant à plusieurs reprises le souvenir des manifestations de mai 1958 et de la politique d’intégration alors préconisée. Mais ils apportent aussi de précieuses informations qui confirment la lutte offensive menée durant quatre mois contre le FLN installé dans les quartiers musulmans, au moyen de bombes posées de nuit par des commandos circulant dans les égouts le 14 février, puis d’une voiture piégée abandonnée en Ville Nouvelle le 28 février, et enfin de tirs de mortiers spécialement construits pour cet usage à partir du 1er mars. Ce livre fournit les preuves d’une action de harcèlement visant systématiquement le FLN et ses alliés les gendarmes mobiles français, mais il ne convainc pas en affirmant que les pertes civiles injustifiées ont été négligeables.

Je dois donc reconnaître que j’ai été imprudent en écrivant à la fin de mon introduction les phrases suivantes : « La fuite en avant des dirigeants militaires et civils de l’OAS se poursuivit : l’organisation poussa à l’extrême son harcèlement des quartiers musulmans, dans l’intention de contraindre le FLN à rompre le cessez-le-feu et d’obliger l’armée française à intervenir pour protéger la population française d’Oran. Cette stratégie du pire, poursuivie jusqu’au 28 juin alors même que l’OAS d’Alger avait déposé les armes (et justifiée par l’idée folle de pouvoir conserver au moins un « réduit oranais ») aboutit, une semaine plus tard, à la catastrophe du 5 juillet ». Mais je maintiens que la guerre de l’OAS menée contre le FLN dans les quartiers musulmans tenus par celui-ci ne pouvait manquer de susciter des désirs de vengeance, non seulement chez les combattants et terroristes du FLN-ALN, mais aussi chez les civils qui partageaient les mêmes risques.

Il reste alors une question sans réponse : pourquoi ce massacre au bilan si lourd est-il resté si méconnu en France ? Et pourquoi le livre de Jean-Jacques Jordi, réalisé à la demande du gouvernement Fillon, n’a-t-il suscité aucune réaction officielle des gouvernements de Jean-Marc Ayrault et de Manuel Valls, alors que les municipalités socialistes de Paris et de Strasbourg honorent publiquement la mémoire de la répression du 17 octobre 1961, et que la mairie de Marseille - droite et gauche confondues - commémore celle qui suivit la révolte du 8 mai 1945 ? Une réponse à ces questions me paraît souhaitable.

Guy Pervillé

Voici le sommaire de ce numéro :

-  Présentation des ANOM, par Benoît Van Reeth

-  Le griot, l’historien, le chasseur et l’UNESCO, par Francis Simonis

-  Archives du Sénégal, par Jacques Charpy, Saliou M’baye et Benoît Van Reeth

-  De l’utilité des archives privées : vers un historique de la création de l’armée malienne, par Sébastien Philippe

-  Portfolio : villes impériales, regards croisés franco-allemands sur le passé colonial, par Catherine Atlan et Johannes Grossmann

-  A propos d’un événement occulté : le massacre du 5 juillet 1962 à Oran, par Guy Pervillé

-  Auguste Pavie, l’explorateur aux pieds nus,1847-1925, par Isabelle Dion

-  Littérature et colonialisme : l’exemple du phénomène eurasien, par Alain Ruscio

-  Des centres de ressources : le MUCEM et le CDHA, par Aurélie Goustans et Joseph Perez

-  Recensions : Auguste Pavie, explorateur aux pieds nus, par André Brochier ; L’Afrique soudanaise au Moyen-Age, par Dominique Buisine, Oran 5 juillet 1962, leçon d’histoire sur un massacre, par Grégor Mathias.

-  Hommages : Charles Fourniau (1921-2010), par Alain Ruscio ; Daniel Lefeuvre (1951-2013), une contre-vision de l’Algérie coloniale non démentie, par Michel Renard.

[1] Jean-Jacques Jordi, Un silence d’Etat. Les disparus européens de la guerre d’Algérie. Paris, SOTECA, 2011, 200 p.

[2] Pétition internationale, 5 juillet 1962 à Oran-Algérie, lancée en octobre 2013.

[3] Guy Pervillé, Oran, 5 juillet 1962, leçon d’histoire sur un massacre. Paris, Vendémiaire, 2014, 315 p.

[4] Guillaume Zeller, Oran, 5 juillet 1962, un massacre oublié. Paris, Tallandier, 2012, 223 p.

[5] Yves Courrière, Les feux du désespoir, Paris, Fayard, 1971, pp 645-646.

[6] Yves Courrière et Philippe Monnier, La guerre d’Algérie en images, Paris, Fayard, 1972, pp 269-270, et dans L’agonie d’Oran, 5 juillet 1962, Editions Jacques Gandini, t 3, 2001, pp 187-189.Voir la photo reproduite sur la couverture de mon livre cité.

[7] Michel de Laparre, Journal d’un prêtre en Algérie (Oran 1961-1962), 1ère édition 1964, 2ème édition Page après page, 2004.

[8] Gérard Israël, Le dernier jour de l’Algérie française, Paris, Robert Laffont, 1972.

[9] Geneviève de Ternant (s.dir.), L’agonie d’Oran, 5 juillet 1962, Editions Jacques Gandini, 1985, 1991, 1996 et 2001.

[10] Joseph Katz, L’honneur d’un général, Oran 1962. Préface de Charles-Robert Ageron. Paris, L’Harmattan, 1993.

[11] Jean Monneret, , La phase finale de la guerre d’Algérie. Paris, l’Harmattan, 2001.

[12] Maurice Faivre, Les archives inédites de la politique algérienne, 1958-1962, Paris, L’Harmattan, 2000.

[13] Eric Kocher Marboeuf, Le Patricien et le Général, Jean-Marcel Jeanneney et Charles de Gaulle, 1958-1969, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2003.

[14] Jean Monneret, La tragédie dissimulée, Oran 5 juillet 1962, Paris, Michalon, 2006.

[15] Claude Micheletti : Fors l’honneur, la guérilla OAS à Oran en 1961-1962. 2ème édition, Jean-Louis Pons, 2003.

[16] Olivier Dard, Voyage au cœur de l’OAS. Paris, Perrin, 2005, et 2ème édition, collection Tempus, 2011.

[17] OAS Zone III (Oran), Messages, directives et commentaires, 23 mars 1961-27 juin 1962 (T/637).



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